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LE DEUIL

Le DeuilLe monde paraissait si laid.Comme si on l'avait vidé,De ses couleurs et de sa viePourquoi t'aurait-on pris ?Chaque seconde est un calvaireOn se croirait en enfer.Préférer le Diable à DieuJuste pour revoir tes beaux yeux.Ne regardant pas derrièreComme Orphée a pu le faire,Mais bravant tous les dangersPour te revoir en santé.

28 Janvier 1890 Voilà maintenant presque deux mois que tu as disparu. Deux mois depuis ta mort et celle de mon monde. S'il te plaît, je ne peux vivre sans toi ! Je t'aime tellement, reviens à la maison. Je sais que tu es là et que tu m'entends. Reviens à la maison, avec moi. Je sais que tu ne peux pas m'abandonner. Je t'aime tellement. Reviens, nous referons des balades sur les côtes, comme tu les aimes tant ! Pourquoi te caches-tu, je sais que tu es là et que tu n'es pas partie. Je t'en supplie, je ne suis rien sans toi. 2 février 1890 Dieu, pourquoi m'as-tu pris ma femme ? Ma bien aimée, l'amour de ma vie. Si tu es si bon, pourquoi prendre la personne la plus merveilleuse en ce monde, cet ange envoyé sur terre. Et toi Satan, pourquoi me montrer le fantôme de ma femme ? Comme si elle était encore en vie. Pourquoi me tourmenter ainsi ? Cette femme était mon paradis, mais maintenant qu'elle y est partie c’est l’enfer sur terre. 6 février 1890 Chérie, ma chérie, pourquoi ai-je l’impression de te voir dans le miroir ? Pourquoi ton odeur est toujours dans la maison ? Pourquoi viens-tu me voir dans mes rêves ? Je n'ai pas la force d'arroser tes plantes, alors pourquoi ne sont-elles toujours pas mortes après plusieurs mois ? Tu continues de vivre dans la maison, pourquoi ne t'en vas-tu pas ? Pourquoi continues-tu de venir me voir, tu devrais être morte ? 8 février 1890 Je n'en peux plus. Pourquoi me faire ça ? Pourquoi me faire ça ! Deviendrais-je fou ? D'ou vient le mot laissé sur le bord de la table ? « Toujours avec toi », pourquoi m'écrire ça ma chérie ? Serais-je schizophrène ? Me hanterais-tu ? Je me sens si a l'étroit dans notre maison, comme si on m'observait tout le temps, est-ce toi ? De plus en plus de morceaux de la journée me paraissent flou, m'échappent. Est-ce toi, ou bien un trouble mental ? Le monde me paraît si flou... Pourquoi ai-je l'impression qu'une guerre se déroule entre mon cœur et mon esprit ? Tout les jours je crois te voir me suivre, pourquoi me faire tant de mal ?

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14 février 1890Depuis quelque temps, le monde semble si vide. Comme si on lui avait aspiré l'âme. Plus d'air, comme si la vie s'était arrêtée. Je passe mes journées sous l'arbre du jardin, à regarder les nuages défiler, le regard vide. Mais tu me tiens compagnie, t'allongeant près de moi. J'en suis certain ; même sans te voir, je te sens. J'ai oublié quand j'ai mangé pour la dernière fois, et quand je me suis lavé. Je ne saurais comment l'expliquer, mais quelque chose est mort en moi, perdu quelque part. Et ma tête est un gouffre sans fond, où il règne un chaos effroyable, un orage absolument terrifiant qui gronde en permanence. Mon journal est mon seul réconfort, il est comme mon âme.3 mars 1890Il y a près de deux semaines, un ami est venu me voir, M'apportant de quoi manger, s'inquiétant de ne pas avoir de nouvelles. La peine dans ses yeux au moment où il m'a vu sale, maigre, avec un visage fatigué et, sous mes yeux, d'énormes cernes, m’a fait mal. Il m'a pris dans ses bras et a pleuré pendant de longues minutes. Il est resté à la maison quelques heures mais est parti très rapidement ne se sentant pas bien. Il semblait fatigué, comme s’il était resté plusieurs jours sans dormir et avait le dos vouté comme s’il portait le ciel sur ses épaules ; alors qu'en arrivant, il paraissait en parfaite santé. Après son départ, je me suis enfin nettoyé et changé pour me changer les idées, mais le changement qu'il avait subi en quelques heures me revenait toujours à l'esprit.9 mars 1890En rangeant, je suis tombé sur tes affaires, puis ça m'a fait comme une balle en plein cœur. Tous ces souvenirs m'ont assailli, coupé le souffle, une pluie de flèches ne serait rien comparé à ça. La vie avait rebasculé dans la souffrance, l'enfer. Le monde s'était remis en route si vite, je n'y comprenais rien, tout était perdu. Je voudrais hurler, mourir. Faîtes que cela cesse ! J'ai beau me frapper la tête contre le mur pendant des heures, rien n'y fait. Rien ne me calme, rien ne me laisse tranquille. Comme je voudrais mourir et arrêter de souffrir !

Je pris le chemin de sa maison avec un poids sur le cœur. Un mauvais sentiment m'avait envahi depuis que j’étais sorti de la voiture. M'inquiétant pour mon ami, qui ne sortait presque jamais depuis la mort de sa femme, emportée par la maladie près de quatre mois auparavant. Quand j'étais venu le mois précédent, un immense mal-être m'avait pris puis une fièvre m'avait alité pendant plusieurs jours, je n'avais donc pas pu davantage m'occuper de sa santé. Lorsque je m'approchai de la demeure, je vis son ombre marcher le long des fenêtres. Je me dis alors que la santé lui était revenue. Mais plus je m'approchais, plus mes pas devenaient lourds. Une étrange atmosphère régnait dans la maison. Ouvrant la porte, un énorme bazar m'arrêta. Des vêtements étalés au sol, le mobilier renversé, comme si un ouragan était entré. Après quelques pas, je m'effondrai au sol. J'avais l'impression de tenir le monde sur mes épaules. Au bout de quelques efforts, je me relevai et partis dans le salon. Retombant au sol, je le vis. Je le vis. Le corps de mon ami. Il était mort, pendu par la poutre du plafond. Mais il était détaché et allongé au sol. Les vêtements de sa bien aimée étalés près de lui. Un immense sourire sur son visage comme figé et un foulard de sa femme serré dans sa main. J'étais trop tétanisé pour bouger mais je crus entendre les pleurs d'une femme. Les vêtements de mon ami étaient froissés et mouillés comme si on l'avait pris dans ses bras et qu'on le pleurait.

Loyd TRAN

Clovis BENARD

William JAMES

Louise GROSS

AUTEURS