Inégalités en Russie

Nouveaux riches et nouveaux pauvres

Les inégalités augmentent partout dans le monde mais dans ce domaine, la Russie, véritable puits de pétrole et de gaz, ancienne patrie du communisme, pourrait bien remporter la palme d’or. Selon un récent rapport, 1 % de la population russe concentre 74,5 % des richesses nationales. Ces chiffres sont considérablement plus élevés que dans n’importe quelle autre puissance, loin devant les États-Unis ou la Chine. « Nulle part ailleurs la richesse n’est à ce point inégalement répartie, et cela a des implications dangereuses pour l’avenir politique de la Russie », relève le journaliste économique Boris Grozovski dans The Moscow Times. [...] L’économie est entrée en récession il y a deux ans, sous le double effet de la chute des prix du pétrole et des sanctions internationales* , entraînant dans leur sillage le cours du rouble**. La classe moyenne a été particulièrement touchée. [...]

Vladimir Poutine se donnait pour objectif de diviser par deux la pauvreté dans le pays à l’horizon 2024 mais la tendance semble mauvaise. Selon les statistiques officielles publiées par l’institut Rosstat, le nombre de pauvres est en nette augmentation. En deux ans, le nombre de pauvres a augmenté de 14,4 %. La Russie définit son seuil de pauvreté en dessous de 11 700 roubles par personne (134 euros environ). Le salaire minimum russe est d’environ 14 000 roubles ( 161 euros environ).

Des inégalités criantes à Moscou

Moscou offre une photographie impressionnante de l’extension des inégalités sociales en Russie. La nouvelle rue Arbat est devenue le temple de la jeunesse russe et des grandes enseignes de luxe. Sur la célèbre Place Rouge, se dresse le grand magasin de luxe GOUM. Un autre quartier témoignant de la concentration de richesse dans la ville est le quartier des affaires, Moskva-City. Au moins 70 des 110 milliardaires russes (soit un tiers du total des milliardaires européens) vivent dans la capitale. Et tout cela fait inexorablement monter le prix de l’immobilier, ainsi que ceux des produits et des services. [...] À côté des nouveaux riches, il y a désormais les nouveaux pauvres : enfants des rues, retraités contraints de vivre dans la précarité avec une pension de misère, et puis il y a les SDF. De nombreux quartiers périphériques, comme celui de Novo Peredelkino, témoigne de la précarité dans laquelle vivent de plus en plus de Russes.

« La Russie, palme d’or des inégalités extrêmes », Le Monde, 14 janvier 2017

* À la suite de l'annexion de la Crimée, en Ukraine en 2014.

** Monnaie russe.