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LE CDI REVIENT CHEZ VOUS

Semaine du 06 au 11 septembre

Bonjour,Cette semaine (6-11septembre) les ressources contenues dans cette publication sont en rapport avec les activités de français proposées dans ton livret. Elles vont t'aider dans ton travail ou te permettre d'approfondir certains points. J'espère que cette nouvelle ressource égayera ton quotidien !Bon courage ! Mme Marchand

SOMMAIRE

5° le conte merveilleux

4° la nouvelle

3° l'aubiographie

6° la figure du monstre dans le conte (sorcières et ogresses)

SE RACONTER GRÂCE L'ECRITURE ET A L'ART : L'AUTOBIOGRAPHIE, L'AUTOPORTRAIT, LE CINEMA...

Pour aller plus loin...Une petite liste de romans autobiographiques

Nathalie Sarraute La comédienne Irène Jacob lit un extrait d'enfance sur France Culture

Caractéristiques de l'écriture autobiographique

Découvre l'entreprise autobiographique de Jean-Jacques Rousseau

Frida Kahlo autoportrait au collier d'épines

Vincent Van Gogh, l'obsession pour les autoportraits

Agnès Varda se raconte au cinéma avec le film : Les plages d'Agnès

Auguste Renoir

Ouvrages autobiographiques (romans, journaux, BD, albums…) disponibles au CDI. Hervé Bazin. Vipère au poing. Roman autobiographique dans lequel Hervé Bazin raconte la cruauté de sa mère. Jean, dit Brasse-Bouillon, et son frère, haïssent mais doivent faire face à une mère odieuse et excessivement sévère qu'ils ont surnommé Folcoche... Nathalie Heirani Salmon-Hudry. Je suis née morte. Autobiographie revendicatrice d'une jeune handicapée qui réclame les mêmes égards et les mêmes droits que ses concitoyens. Tavae Raioaoa et Lionel Duroy. Si loin du monde A Tahiti, en 2002, un homme démarre tranquillement son bateau pour une journée de pêche. Il connaît bien la mer. Mais voilà qu'après l'île de Moorea, le bateau tombe en panne et part à la dérive. Il se fait tard et la nuit tombe. La famille s'inquiète de ne pas le voir rentrer et alerte les secours mais il reste introuvable. C'est ainsi que Tavae va errer pendant 118 jours au milieu du Pacifique sans eau et sans nourriture. Dans ce fragment d'autobiographie, il raconte son extraordinaire périple et le miracle de sa survie Joseph Joffo. Un sac de billes. Récit autobiographique dans lequel l'ateur revient sur ses souvenirs de 1941, pendant l'occupation. Joseph et son frère doivent porter l'étoile jaune. Bientôt, ils ne pourront plus aller à l'école et devront fuir Paris pour se réfugier en zone libre… Hans Peter Richter. Mon ami Frédéric. En Allemagne, avant 1933, deux enfants sont inséparables. L'un d'eux s'appelle Frédéric et il est juif. Mais, à partir du moment où Hitler prend le pouvoir, les juifs sont peu à peu privés de leurs droits. Bientôt Frédéric est chassé de l'école... Art Spiegelman. Maus : l’intégrale. (BD) La vie d'un rescapé juif des camps nazis et de son fils, auteur de bandes dessinées. Le récit d'une double survie. Jean-Jacques Rousseau. Les confessions. Rousseau est un (voire « le ») précurseur de la démarche autobiographique. Il part de l'enfance pour démêler le fil de sa vie. Il livre aux lecteurs les secrets de son cœur, ses malheurs et aussi ses moments de bonheur, moments tendres, moments drôles parfois. Il s'efforce de faire un récit sans fard, de tendre au lecteur un miroir dans lequel il ne lui sera pas toujours agréable de se reconnaître. Emmanuelle Laborit. Le cri de la mouette. Roman autobiographique d'une jeune femme sourde de naissance. Elle ne connaît qu'une chose : le silence. Pour s'évader de cette prison, elle se met à crier. Des cris d'oiseau de mer, disent ses parents. Jusqu'au jour où à sept ans, la mouette découvre le langage des signes. La petite fille se transforme : le monde s'ouvre à elle... Elle sera comédienne puisque c'est son rêve le plus cher. Adolescente révoltée, Emmanuelle va lutter, souffrir et finalement gagner son combat : être actrice mais aussi plaider la cause de millions de malentendants. Pour que le monde des sourds ne soit plus le monde du silence. Primo Levi. Si c’est un homme. Un livre fondamental pour comprendre l'univers concentrationnaire nazi. Primo Levi fait le récit bouleversant de son internement à Aushwitz, il restitue la complexité du malheur et les affres de la déshumanisation. Marcel Pagnol. La gloire de mon père Peter Sis. Le mur : une enfance derrière le rideau de fer. (Album) L'illustrateur raconte son enfance et son adolescence à Prague, de sa naissance en 1948 jusqu'à son exil aux Etats-Unis dans les années 1980. A travers ses dessins d'enfant et d'adulte et des extraits de son journal il témoigne de la vie quotidienne dans le bloc communiste jusqu'à la chute du mur de Berlin. Annie Duperey. Le voile noir. A huit ans la comédienne Annie Duperey découvre ses parents morts dans un accident domestique. Pour continuer à avancer, la petite fille devient "amnésique" et oublie le passé. Plus de trente ans après ce terrible drame, dans cet essai autobiographique, elle fait resurgir ses souvenirs d'enfance à travers les photographies laissées par son père, photographe. Calamity Jane. Lettres à sa fille. Calamity Jane fit adopter sa fille à l'âge d'un an afin qu'elle profite d'une vie stable et d'une éducation solide. Cette figure dure et emblématique du Far West écrit régulièrement des lettres à sa fille. Dans ses lettres, elle se montre sous un jour inédit, celui d'une femme sensible et aimante... Annie Ernaux. La place. A travers ce récit autobiographique, Annie Ernaux enfant d’après-guerre, évoque ses origines modestes, retrace son enfance puis son adolescence et tente de combler la distance qui s'est creusée entre elle et son père. J. M. G Le Cléziot. L’Africain. Où J.M.G. Le Clézio raconte la période pendant laquelle il a vécu en Afrique avec sa famille. Après cet épisode, il fut séparé de son père pendant de nombreuses années. L'auteur déclare que les retrouvailles avec ce dernier loin d'être joyeuses, furent douloureuses. Il comprend très vite qu'il ne connait pas véritablement son père et que ses souvenirs sont de l'ordre du fantasme. Il fait donc un effort pour faire éclore une mémoire "objective" de cette expérience africaine. Le résultat en est cette autobiographie. Romain Gary. La promesse de l’aube. Romain Gary narre sa relation avec sa mère. Comment, jeune homme, il dû faire face à son immense amour, envahissant, plein de rêves et d'ambition. "Tu seras un héros !", lui dit-elle un jour. Et encore d’autres titres. Ils ne sont pas disponibles au CDI mais peut-être les as-tu dans ta bibliothèque… Marjane Satrapi. PersepolisRiad Sattouf. L'arabe du futurJean-Dominique Bauby. Le scaphandre et le papillonMarguerite Duras. L'amantAzouz Begag. Le gone du Chaâba.Camara Laye. L'enfant noir

Les différentes formes de l’écriture autobiographique - Autobiographie : le mot est formé à partir de trois mots grecs : graphein, écrire + bios, vie + autos, soi-même. Le terme désigne au début du XXe siècle des textes dans lesquels un individu réel parle de sa vie quels que soient la fonction et le contenu du texte. Cependant rapidement des nuances vont apparaître et vont donner naissance à des désignations plus fines en fonction des contenus et des choix de narration. - Roman autobiographique : le roman autobiographique met en scène un héros différent de l'auteur, il peut ou ne pas être le narrateur. Un lecteur averti pourra faire les rapprochements utiles entre les faits rapportés et les épisodes connus de la vie de l'auteur. - Journal : à la différence du texte autobiographique, le journal intime ne présuppose pas l'existence d'un destinataire. Le lecteur d'un journal intime est l'auteur lui-même - cependant quelques écrivains savent que leur journal pourra faire l'objet d'une publication posthume-. Rédigé au jour le jour, le journal intime n'est donc pas un récit rétrospectif, il ne permet pas à son auteur d'opérer une réflexion sur sa vie passée. - Mémoires : ici, auteur, narrateur et personnage sont une seule et même personne mais le personnage se présente comme témoin de l'Histoire ou de la société de son temps et non comme le sujet central du récit. - Récit de vie : une personne raconte sa vie ou un fragment de sa vie.- Autofiction : hybride du récit vrai et du récit, il se situe entre le roman et l'autobiographie [...]. Pour être autofiction, le livre doit être clairement désigné comme « roman », c'est-à-dire comme histoire feinte ou fictive, et le même nom, de préférence conforme à l'état civil, doit désigner l'auteur, le narrateur, le protagoniste.

LA NOUVELLE

La nouvelle à chute.Découvre la biographie et l'oeuvre de Roald Dahl sur le site de Ricochet

Une nouvelle de Maupassant : La Petite Roque(écoute)

Qu'est-ce qu'une nouvelle ?

?

Découvre Edgar Allan Poe nouvelliste anglais et père du roman policier

Une nouvelle : Coup de gigot de Roald Dahl(écoute)

Lamb to the Slaughter

En cliquant ici, lis Coup de gigot en anglais

(lecture documentaire)

(Lire en anglais)

(Lecture documentaire)

(lecture documentaire)

Quelles sont les caractéristiques d’une nouvelle littéraire ? 1) La nouvelle littéraire est un récit. Elle représente donc un texte narratif. 2) Elle est une œuvre de l’imagination. 3) La nouvelle est littéraire. On emploie des figures de style, on choisit une formule narrative, on exploite les ressources de la langue pour créer des effets, captiver le lecteur, susciter en lui des émotions et des réflexions. 4) Elle est brève et peut généralement être lue en une seule séance de lecture. Le lecteur n’a pas à s’interrompre comme avec un roman. Tout est saisi dans un temps limité et l’univers présenté est extrêmement concentré. La nouvelle se fonde sur la concision : peu de personnages, d’événements et de lieux. Tout doit être ramassé et réduit. 5) À l’opposé du roman, la nouvelle se concentre sur une action unique. Les nouvellistes ne cherchent donc pas à multiplier les intrigues ou les péripéties, au contraire. L’action est souvent réduite à un seul événement. Il se passe donc peu de choses entre la situation initiale et la situation finale. Attention, cela ne signifie pas que ce qui se passe n’a pas d’importance, loin de là. 6) Entre le début et la fin de la nouvelle littéraire, une transformation psychologique s’est opérée chez le personnage principal. 7) La concentration de l’action impose un nombre limité de personnages. Notez que la plupart du temps, la nouvelle en présente un seul. La description physique et psychologique de ce personnage est réduite au maximum. Il arrive même qu’on ignore son identité. Il est juste une personne grammaticale, il , elle ou je , sans plus. Lorsqu’un personnage central est décrit, son physique reflète parfaitement ce qu’il est. Le personnage devient alors un type humain très précis. Quant à la psychologie du personnage, elle sera dévoilée par son comportement. Les autres personnages, ceux qui gravitent parfois autour du héros, sont traités de façon encore plus succincte. 8) Les lieux dépeints dans la nouvelle littéraire sont en général peu nombreux et esquissés seulement. Ils ont cependant une grande importance. Chaque élément devient significatif. Bref, La nouvelle présente un univers concentré, qui se caractérise par une grande unité.

LE CONTE MERVEILLEUX

Découvre Hans-Christian Andersen (lecture documentaire)

Une émission de Lumni pour comprendre ce que nous cachent les contes de fées

Visite l'exposition de la BNF : Il était une fois... Les contes de fées

- Le garçon porcher- La princesse au petit pois- Le costume neuf de l'Empereur

3 contes d'Andersen lus par Jean Pierre Cassel (écoute)

(lecture)Mini contes à lire en moins de deux !

Qui a inventé La Reine des Neiges ?

LA FIGURE DU MONSTRE (SORCIERES, OGRESSES...)

Circé l'ensorceleuse(écoute)

Circé chantée par Juliette

Blanche-Neige(lecture)

Découvre une sorcière "moderne" avec Pierre Gripari.La sorcière de la rue Mouffetard(écoute)

A Tahiti aussi il y a des monstres !La légende de Nona l'ogresse la "mangeuse d'hommes"(écoute)

Une professeure de français lit l'épisode d'Ulysse dans lequel les compagnons du héros se font ensorceller par la magicienne Circé

Le mythe de Circé a inspiré une chanson à Juliette. Clique sur le lien pour découvrir cette chanson !

Tu connais certainement la version de Blanche-Neige réalisée par Walt Disney mais peut-être n'as-tu jamais lu le conte original des frères Grimm. Clique sur le lien pour obtenir le texte.

Raiponce

(lecture)

Blanche Neige Texte intégral en Français Il était une fois, en plein hiver, quand les flocons descendaient du ciel comme des plumes et du duvet, une reine qui était assise et cousait devant une fenêtre qui avait un encadrement en bois d'ébène, noir et profond. Et tandis qu'elle cousait négligemment tout en regardant la belle neige au-dehors, la reine se piqua le doigt avec son aiguille et trois petites gouttes de sang tombèrent sur la neige. C'était si beau, ce rouge sur la neige, qu'en le voyant, la reine songea: "Oh! Si je pouvais avoir un enfant aussi blanc que la neige, aussi vermeil que le sang et aussi noir de cheveux que l'ébène de cette fenêtre !" Bientôt après, elle eut une petite fille qui était blanche comme la neige, vermeille comme le sang et noire de cheveux comme le bois d'ébène, et Blanche-Neige fut son nom à cause de cela. Mais la reine mourut en la mettant au monde. Au bout d'un an, le roi prit une autre femme qui était très belle, mais si fière et si orgueilleuse de sa beauté qu'elle ne pouvait supporter qu'une autre la surpassât. Elle possédait un miroir magique avec lequel elle parlait quand elle allait s'y contempler: Miroir, gentil miroir, dis-moi, dans le royaume Qui est la femme la plus belle ? Et le miroir lui répondait: Vous êtes la plus belle du pays, Madame. Alors la reine était contente, car elle savait que le miroir disait la vérité. Blanche-Neige cependant grandissait peu à peu et devenait toujours plus belle; et quand elle eut sept ans, elle était belle comme le jour et bien plus belle que la reine elle même. Et quand la reine, un jour, questionna son miroir: Miroir, gentil miroir, dis moi, dans le royaume. Quelle est de toutes la plus belle ? Le miroir répondit : Dame la reine, ici vous êtes la plus belle, mais Blanche-Neige l'est mille fois plus que vous. La reine sursauta et devint jaune, puis verte de jalousie ; à partir de cette heure là, elle ne pouvait plus voir Blanche-Neige sans que le cœur lui chavirât dans la poitrine tant elle la haïssait. L'orgueil poussa dans son cœur, avec la jalousie, comme pousse la mauvaise herbe, ne lui laissant aucun repos ni de jour, ni de nuit. Elle appela un chasseur et lui dit: "Tu vas prendre l'enfant et l'emmener au loin dans la forêt: je ne veux plus la voir devant mes yeux. Tu la tueras et tu me rapporteras son foie et ses poumons en témoignage." Le chasseur obéit et emmena l'enfant ; mais quand il tira son couteau de chasse pour plonger dans le cœur innocent de Blanche-Neige, elle se prit à pleurer et lui dit : - Oh ! Laisse-moi la vie sauve, mon bon chasseur: je m'enfuirai à travers bois et ne reparaîtrai jamais ! Elle était si belle que le chasseur s'apitoya et lui dit: "Sauve toi ma pauvre petite !" Il était certain, au dedans de lui-même, que les bêtes sauvages auraient tôt fait de la dévorer; mais il n'en avait pas moins le cœur soulagé d'un gros poids en évitant ainsi de la tuer de sa main; et comme un marcassin passait par là, il l'abattit et le dépouilla rapportant son foie et ses poumons à la reine, en guise de preuve. Il fallut que le cuisinier les mît au sel et les fît cuire, après quoi la mauvaise femme les mangea, en croyant se repaître du foie et des poumons de Blanche-Neige. Dans la vaste forêt, la malheureuse fillette était désespérément seule et tellement apeurée qu'elle regardait, pour ainsi dire, derrière chaque feuille sur les arbres, ne sachant que faire ni que devenir. Elle commença à courir, s'écorchant aux épines et sur les pierres pointues, voyant sauter devant elle les bêtes sauvages qui venaient la frôler, mais qui ne lui faisaient pas de mal. Tant que ses petits pieds voulurent bien la porter, elle courut ainsi droit devant, et quand tomba la nuit, n'en pouvant plus, elle eut la chance de voir une toute petite maison où elle entra pour se reposer. Tout était petit dans cette maison en miniature, mais si propre et si charmant que c'est impossible de le dire. Il y avait une petite table qui était déjà mise, avec sa nappe blanche et sept petites assiettes ayant chacune son couvert: le petit couteau, la petite cuiller, la petite fourchette et le petit gobelet. Sept petits lits s'alignaient côte à côte le long du mur, bien faits, et tous avec de beaux draps blancs et frais. Blanche-Neige avait si grand-faim et si terriblement soif qu'elle prit et mangea un petit peu dans chaque petite assiette, puis but une gorgée de vin dans chaque petit gobelet; à chaque place aussi, elle avait pris une bouchée de pain. Après, comme elle était si fatiguée, elle voulut se coucher, mais aucun des petits lits n'était à sa taille: celui-ci était trop long, celui-là trop court, un autre trop étroit; bref, elle les essaya tous et le septième enfin lui alla parfaitement. Elle y resta couchée, fit sa prière et s'endormit. Les maîtres du logis ne rentrèrent chez eux que lorsqu'il faisait déjà nuit noire, et c'étaient les sept nains qui piochent et creusent les montagnes pour trouver les filons de minerais. Ils allumèrent leur petite bougie et s'aperçurent, avec la lumière que quelqu'un était entré chez eux, parce que tout n'était pas parfaitement en ordre ni exactement comme ils l'avaient laissé en partant. - Qui s'est assis sur ma chaise? demanda le premier. - Qui a mangé dans ma petite assiette? fit le second. - Qui a pris un morceau de mon petit pain? dit le troisième. - Qui m'a pris un peu de ma petite potée? s'étonna le quatrième. - Qui a sali ma petite fourchette? questionna le cinquième. - Qui s'est servi de mon petit couteau? interrogea le sixième. - Qui a bu dans mon petit gobelet? s'inquiéta le septième enfin.* Le premier, en regardant un peu partout autour de lui, vit alors qu'il y avait un creux dans son lit et il s'exclama: "qui s'est allongé sur mon petit lit?" Les six autres accoururent et s'écrièrent tous, les uns après les autres: "dans mon petit lit aussi quelqu'un s'est couché!" Tous, sauf le septième, toutefois, qui arriva devant son lit et vit Blanche-Neige qui était couchée et qui dormait. Il appela les autres qui galopèrent jusque là et poussèrent des cris de surprise et d'admiration et levant haut leur petit bougeoir pour éclairer Blanche-Neige. - Ô mon dieu! Ô mon dieu! s'exclamaient-ils tous, la belle enfant! Comme elle est mignonne! Comme elle est jolie! Leur joie était si grande qu'ils ne voulurent pas la réveiller et la laissèrent dormir dans le lit où elle était. Le septième nain s'en alla dormir avec ses compagnons, une heure avec chacun et la nuit fut passée. Au jour, quand Blanche-Neige se réveilla elle eut grand peur en voyant les sept nains; mais ils se montrèrent très amicaux avec elle et lui demandèrent : - Comment t'appelles-tu? - Je m'appelle Blanche-Neige, leur répondit-elle. - Comment es-tu venue dans notre maison? Elle leur raconta que sa marâtre avait voulu la faire mourir, mais que le chasseur lui avait laissé la vie sauve et qu'elle avait couru toute la journée sans s'arrêter, jusqu'au moment qu'elle avait trouvé leur maisonnette. - Veux-tu prendre soin de notre ménage? lui demandèrent les nains. Tu ferais la cuisine, les lits, la lessive, la couture, le tricot, et si tu tiens tout bien propre et bien en ordre, nous pourrions te garder avec nous et tu ne manquerais de rien. - Oh! oui, de tout mon cœur! dit Blanche-Neige. (Et elle resta avec eux). Elle leur faisait le ménage et leur tenait la petite maison bien propre et bien en ordre, et les nains s'en allaient le matin chercher dans la montagne les minéraux et l'or; ils ne revenaient qu'à la nuit, et il fallait alors que leur repas fût prêt. Toute la longue journée Blanche-Neige restait seule, et les gentils petits nains l'avertirent prudemment et lui dirent: "Tiens-toi bien sur tes gardes à cause de ta belle-mère: elle ne tardera pas à savoir que tu es ici. Ne laisse donc entrer personne!" La reine, en effet, quand elle crut avoir mangé le foie et les poumons de Blanche-Neige, ne douta plus dans sa pensée d'être de nouveau la première et la plus belle du royaume. Elle s'en alla devant son miroir et lui parla : Miroir, gentil miroir, dis-moi, dans le royaume quelle est de toutes la plus belle ? Alors le miroir répondit: Dame la reine, ici vous êtes la plus belle, Mais Blanche-Neige sur les monts Là-bas, chez les sept nains, est belle plus que vous, et mille fois au moins ! Elle frémit, car elle savait que le miroir ne pouvait pas dire un mensonge, et elle sut ainsi que le chasseur l'avait trompée et que Blanche-Neige vivait toujours. Alors elle se mit à réfléchir et à réfléchir encore au moyen de la supprimer, car si la reine n'était pas la plus belle de tout le pays, la jalousie la dévorait et ne la laissait pas en repos. Et pour finir, quand elle eut forgé quelque chose, elle se barbouilla le visage et se rendit méconnaissable en s'habillant comme une vieille colporteuse : "De beaux articles à vendre! Rien que du beau, je vends!" Blanche-Neige vint regarder à la fenêtre et cria: - Bonjour, ma bonne dame, qu'est-ce que vous vendez? - Du bel article, du bon article, répondit-elle, du lacet de toutes les couleurs! En même temps elle en tirait un pour montrer : un beau lacet tressé de soie multicolore. " Cette brave femme, pensa Blanche-Neige, je peux la laisser entrer!" Elle déverrouilla et la fit entrer pour lui acheter le beau lacet multicolore qu'elle voulait mettre à son corset. - Mais mon enfant, de quoi as-tu l'air? s'exclama la vieille. Viens ici, que je lace un peu proprement ! Blanche-Neige, sans méfiance, vint se placer devant la vieille et la laissa lui mettre le nouveau lacet ; mais la vieille passa si vite le lacet et le serra si fort que Blanche-Neige ne put plus respirer, suffoqua et tomba comme morte. - Et voilà pour la plus belle! ricana la vieille qui sortit précipitamment. Le soir venu (mais ce n'était pas bien longtemps après) les sept nains rentrèrent à la maison: quel ne fut pas leur effroi en voyant leur chère Blanche-Neige qui gisait sur le sol, inerte et immobile comme si elle était morte! Ils la redressèrent tout d'abord, et en voyant comme elle était sanglée dans son corset, ils se hâtèrent d'en couper le lacet ; le souffle lui revint petit à petit et elle se ranima peu à peu. Lorsque les nains apprirent ce qui lui était arrivé, ils lui dirent: "Cette vieille colporteuse n'était nulle autre que la maudite reine. A l'avenir, garde toi bien et ne laisse entrer nul être vivant quand nous n'y sommes pas!" La méchante femme, de son côté, aussitôt rentrée chez elle s'en alla devant son miroir et le questionna: Miroir, gentil miroir, dis-moi, dans le royaume Quelle est de toutes la plus belle? Et le miroir répondit comme devant : Dame la reine, ici, vous êtes la plus belle, Mais Blanche-Neige sur les monts Là-bas, chez les sept nains, Est plus belle que vous, et mille fois au moins! Son sang s'arrêta quand elle entendit ces paroles qui lui révélaient que Blanche-Neige, une fois encore, avait pu échapper à la mort. "A présent, pensa-t-elle, je vais composer quelque chose à quoi tu n'échapperas pas!" Recourant alors aux artifices des sorcières qu'elle connaissait bien, elle fabriqua un peigne empoisonné. Ensuite elle se grima et s'habilla en vieille femme, mais avec un autre air que la fois précédente. Ainsi travestie, elle passa les sept montagnes pour aller jusque chez les sept nains, frappa à la porte et cria: - Beaux articles à vendre! Beaux articles! Blanche-Neige regarda dehors et cria: - Allez vous-en plus loin! Je ne dois laisser entrer personne dans la maison! - Il n'est pas défendu de regarder! répondit la fausse vieille en tirant le peigne empoisonné pour le lui faire voir à travers la fenêtre. La petite le trouva si beau qu'elle ne put pas résister et qu'elle ouvrit la porte pour acheter le peigne à cette vieille femme. - Et à présent laisse-moi faire, lui dit la vieille, je vais te peigner un peu comme il faut! La pauvre Blanche-Neige, sans réfléchir, laissa faire la vieille, qui lui passa le peigne dans les cheveux; mais à peine avait-elle commencé que le poison foudroya Blanche-Neige, qui tomba de tout son long et resta là, sans connaissance. - Et voilà pour toi, merveille de beauté! ricana la vieille qui s'éloigna bien vite. Par bonheur, la nuit ne tarda pas à venir et les sept nains à rentrer. En voyant Blanche-Neige étendue sur le sol, ils pensèrent tout de suite à l'affreuse marâtre, cherchèrent ce qu'elle avait bien pu faire et trouvèrent le peigne empoisonné; dès qu'ils l'eurent ôté de ses cheveux, Blanche-Neige revint à elle et leur raconta ce qu'il lui était arrivé. De nouveau, ils la mirent en garde et lui recommandèrent de ne jamais plus ouvrir la porte à qui que ce soit. Quand à la reine, aussitôt de retour, elle alla s'asseoir devant son miroir et demanda : Miroir, gentil miroir, dis-moi, dans le royaume Quelle est de toutes la plus belle? Et le miroir répondit encore comme devant: Dame la reine, ici vous êtes la plus belle, Mais Blanche-Neige sur les monts Là-bas, chez les sept nains, Est plus belle que vous, et mille fois au moins ! Quand le miroir eut ainsi parlé, la reine trembla de rage et de fureur et s'écria: - Il faut que Blanche-Neige meure, même si je dois y laisser ma vie ! Alors, elle alla s'enfermer dans une chambre secrète où personne n'entrait jamais, et là, elle confectionna un terrible poison avec lequel elle fit une pomme empoisonnée, mais alors empoisonnée! Extérieurement, elle était très belle, bien blanche avec des joues rouges, et si appétissante que nul ne pouvait la voir sans en avoir envie; mais une seule bouchée, et c'était la mort. Lorsque ses préparatifs furent achevés avec la pomme, la reine se brunit la figure et se costuma en paysanne, puis se rendit chez les sept nains en passant les sept montagnes. Quand elle eut frappé à la porte, Blanche-Neige passa la tête par la fenêtre et lui dit : - Je ne peux laisser entrer personne au monde: les sept nains me l'ont défendu. - Cela m'est égal, dit la paysanne, je saurai bien me débarrasser quand même de mes pommes. Tiens, je vais t'en donner une! - Non, merci, dit Blanche-Neige. Je ne dois rien accepter non plus. - Aurais-tu peur du poison? dit la paysanne. Regarde: je coupe la pomme en deux; la moitié rouge, c'est pour toi, et la blanche, je la mange moi. Parce que la pomme avait été faite si astucieusement que la moitié rouge était seule empoisonnée. Blanche-Neige avait grande envie de cette belle pomme, et quand elle vit la paysanne croquer à belles dents dans sa moitié de pomme, elle ne put pas résister et tendit le bras pour prendre l'autre moitié. Mais à peine la première bouchée fut-elle dans sa bouche qu'elle tomba morte sur le plancher. La reine l'examina avec des regards cruels et partit d'un grand éclat de rire, en s'écriant cette fois avec satisfaction: - Blanche comme neige, rouge comme sang, noire comme le bois d'ébène, ce coup-ci les nains ne pourront plus te ranimer! Et dès qu'elle fut devant son miroir, elle le questionna : Miroir, gentil miroir, dis-moi dans le royaume Quelle est de toutes la plus belle? Alors et enfin, le miroir répondit : Vous êtes la plus belle du pays, Madame! Et là, son cœur envieux fut apaisé autant que peut être apaisé un cœur envieux. Les nains, quand ils revinrent le soir à la maison, trouvèrent Blanche-Neige étendue sur le plancher; mais cette fois elle n'avait plus de souffle et elle était vraiment morte. Ils la relevèrent; ils cherchèrent bien partout s'ils ne trouvaient pas quelque chose d'empoisonné; ils lui défirent son corset; ils peignèrent ses cheveux; ils la lavèrent avec de l'eau, puis avec du vin: mais rien de tout cela n'y fit; morte elle était, la chère petite, et morte elle resta. Ils la couchèrent sur une civière, et tous les sept, ils restèrent à côté et la pleurèrent pendant trois jours. Puis ils pensèrent à l'enterrer; mais elle était encore aussi fraîche que si elle eût été vivante et elle avait encore toutes ses couleurs et ses belles joues rouges. - Nous ne pouvons pas l'enfouir comme cela dans la terre noire! dirent-ils. Alors ils lui firent faire un cercueil de verre afin qu'on pût la voir de tous les côtés, puis ils l'y couchèrent et écrivirent dessus son nom en lettres d'or, en grandes, belles lettres capitales, sous lesquelles ils écrivirent encore qu'elle était une princesse, fille de roi. Ensuite ils portèrent le cercueil au haut de la montagne; et depuis ce moment là il y eut toujours l'un des sept qui y resta pour la garder. Et les bêtes y venaient aussi et pleuraient Blanche-Neige : d'abord ce fut une chouette, puis un corbeau, et une colombe en dernier. Longtemps, longtemps Blanche-Neige resta là, dans son cercueil de verre, sans changer du tout ; le temps passa et passa, mais elle était toujours aussi fraîche, aussi blanche que neige, aussi vermeille que le sang, aussi noire de cheveux que l'ébène poli, et elle avait l'air de dormir. Et puis un jour, il arriva qu'un prince, qui s'était égaré dans la forêt, passa la nuit dans la maison des nains. Il vit sur la montagne le cercueil dans lequel était exposée Blanche-Neige, qu'il admira beaucoup, et il lut aussi ce qui était écrit dessus en grandes lettres d'or. Alors il dit aux nains: - Laissez-moi emporter le cercueil: je vous donnerai en échange ce que vous voudrez. - Pour tout l'or du monde, tu ne pourras nous l'acheter! répondirent-ils. - Alors donnez-le-moi, reprit le prince, parce que je ne puis pas vivre sans admirer Blanche-Neige, et je la traiterai et la vénérerai comme ma bien aimée, comme ce que j'ai de plus cher au monde! Les bons nains, en entendant ses paroles, s'émurent de compassion pour lui et lui donnèrent le cercueil. Le prince le fit prendre par ses serviteurs, qui le chargèrent sur leurs épaules et l'emportèrent. Mais voilà qu'ils trébuchèrent contre une racine en la portant, et la secousse fit rendre à Blanche-Neige le morceau de pomme qui lui était resté dans le gosier. Ainsi libérée, elle ouvrit les yeux soulevant le couvercle de verre et se redressa, ayant retrouvé la vie. - Ô mon dieu, mais où suis-je? s'exclama-t-elle. - Tu es près de moi! lui répondit le prince tout heureux, avant de lui raconter ce qui s'était passé. Puis il dit: - Je t'aime et tu m'es plus chère que tout au monde. Viens, accompagne-moi au château de mon père: tu seras mon épouse. Alors Blanche-Neige s'éprit de lui et elle l'accompagna, et leurs noces furent célébrées dans la magnificence et la somptuosité. Mais à ce grand mariage princier, la reine terrible et maudite marâtre de Blanche-Neige fut invitée aussi; et quand elle se fut richement habillée et parée elle alla devant son miroir pour lui poser sa question: Miroir, gentil miroir, dis-moi, dans le royaume Qui est la femme la plus belle ? Et le miroir lui répondit: Dame la reine, ici vous êtes la plus belle, mais la nouvelle reine est mille fois plus belle. Un juron échappa à l'horrible femme qui fut prise d'effroi, d'un tel effroi qu'elle ne savait plus que devenir. Pour commencer, son idée fut de ne pas aller du tout aux fêtes du mariage; mais elle ne put y tenir et il fallut qu'elle y allât, dévorée par la jalousie pour voir cette jeune reine. Lorsqu'elle fit son entrée, elle reconnut immédiatement Blanche-Neige, et la peur qu'elle en eut la cloua sur place, sa terreur l'empêcha de bouger. Mais on lui avait préparé des souliers de fer qui étaient sur le feu, à rougir: on les lui apporta avec des tenailles et on les mit devant elle, l'obligeant à s'en chausser et à danser dans ces escarpins de fer rouge jusqu'à sa mort, qui suivit bientôt. Jakob (1785-1863) et Wilhelm (1786-1859) Grimm Publié en 1812 dans les Contes d'enfants et du foyer. Texte sur Gallica, bibliothèque numérique :

Raiponce Les frères Grimm Il était une fois un mari et sa femme qui avaient depuis longtemps désiré avoir un enfant, quand enfin la femme fut dans l'espérance et pensa que le Bon Dieu avait bien voulu accomplir son vœu le plus cher. Sur le derrière de leur maison, ils avaient une petite fenêtre qui donnait sur un magnifique jardin où poussaient les plantes et les fleurs les plus belles; mais il était entouré d'un haut mur, et nul n'osait s'aventurer à l'intérieur parce qu'il appartenait à une sorcière douée d'un grand pouvoir et que tout le monde craignait. Un jour donc que la femme se tenait à cette fenêtre et admirait le jardin en dessous, elle vit un parterre planté de superbes raiponces avec des rosettes de feuilles si vertes et si luisantes, si fraîches et si appétissantes, que l'eau lui en vint à la bouche et qu'elle rêva d'en manger une bonne salade. Cette envie qu'elle en avait ne faisait que croître et grandir de jour en jour ; mais comme elle savait aussi qu'elle ne pourrait pas en avoir, elle tomba en mélancolie et commença à dépérir, maigrissant et pâlissant toujours plus. En la voyant si bas, son mari s'inquiéta et lui demanda : « Mais que t'arrive-t-il donc, ma chère femme ? - Ah ! lui répondit-elle, je vais mourir si je ne peux pas manger des raiponces du jardin de derrière chez nous ! » Le mari aimait fort sa femme et pensa : « plutôt que de la laisser mourir, je lui apporterai de ces raiponces, quoi qu'il puisse m'en coûter ! » Le jour même, après le crépuscule, il escalada le mur du jardin de la sorcière, y prit en toute hâte une, pleine main de raiponces qu'il rapporta à son épouse. La femme s'en prépara immédiatement une salade, qu'elle mangea avec une grande avidité. Mais c'était si bon et cela lui avait tellement plu que le lendemain, au lieu que son envie fût satisfaite, elle avait triplé. Et pour la calmer, il fallut absolument que son mari retournât encore une fois dans le jardin. Au crépuscule, donc, il fit comme la veille, mais quand il sauta du mur dans le jardin, il se figea d'effroi car la sorcière était devant lui ! - Quelle audace de t'introduire dans mon jardin comme un voleur, lui dit-elle avec un regard furibond, et de venir me voler mes raiponces ! Tu vas voir ce qu'il va t'en coûter ! - Oh ! supplia-t-il, ne voulez-vous pas user de clémence et préférer miséricorde à justice ? Si Je l'ai fait, si je me suis décidé à le faire, c'est que j'étais forcé : ma femme a vu vos raiponces par notre petite fenêtre, et elle a été prise d'une telle envie d'en manger qu'elle serait morte si elle n'en avait pas eu. La sorcière fit taire sa fureur et lui dit : « Si c'est comme tu le prétends, je veux bien te permettre d'emporter autant de raiponces que tu voudras, mais à une condition : c'est que tu me donnes l'enfant que ta femme va mettre au monde. Tout ira bien pour lui et j'en prendrai soin comme une mère. » Le mari, dans sa terreur, accepta tout sans discuter. Et quelques semaines plus tard, quand sa femme accoucha, la sorcière arriva aussitôt, donna à l'enfant le nom de Raiponce et l'emporta avec elle. Raiponce était une fillette, et la plus belle qui fut sous le soleil. Lorsqu'elle eut ses douze ans, la sorcière l'enferma dans une tour qui se dressait, sans escalier ni porte, au milieu d'une forêt. Et comme la tour n'avait pas d'autre ouverture qu'une minuscule fenêtre tout en haut, quand la sorcière voulait y entrer, elle appelait sous la fenêtre et criait : Raiponce, Raiponce, Descends-moi tes cheveux. Raiponce avait de longs et merveilleux cheveux qu'on eût dits de fils d'or. En entendant la voix de la sorcière, elle défaisait sa coiffure, attachait le haut de ses nattes à un crochet de la fenêtre et les laissait se dérouler jusqu'en bas, à vingt aunes au-dessous, si bien que la sorcière pouvait se hisser et entrer. Quelques années plus tard, il advint qu'un fils de roi qui chevauchait dans la forêt passa près de la tour et entendit un chant si adorable qu'il s'arrêta pour écouter. C'était Raiponce qui se distrayait de sa solitude en laissant filer sa délicieuse voix. Le fils de roi, qui voulait monter vers elle, chercha la porte de la tour et n'en trouva point. Il tourna bride et rentra chez lui ; mais le chant l'avait si fort bouleversé et ému dans son cœur, qu'il ne pouvait plus laisser passer un jour sans chevaucher dans la forêt pour revenir à la tour et écouter. Il était là, un jour, caché derrière un arbre, quand il vit arriver une sorcière qu'il entendit appeler sous la fenêtre : Raiponce, Raiponce, Descends-moi tes cheveux. Alors Raiponce laissa se dérouler ses nattes et la sorcière grimpa. « Si c'est là l'escalier par lequel on monte, je veux aussi tenter ma chance », se dit-il ; et le lendemain, quand il commença à faire sombre, il alla au pied de la tour et appela : Raiponce, Raiponce, Descends-moi tes cheveux. Les nattes se déroulèrent aussitôt et le fils de roi monta. Sur le premier moment, Raiponce fut très épouvantée en voyant qu'un homme était entré chez elle, un homme comme elle n'en avait jamais vu ; mais il se mit à lui parler gentiment et à lui raconter combien son coeur avait été touché quand il l'avait entendue chanter, et qu'il n'avait plus eu de repos tant qu'il ne l'eût vue en personne. Alors Raiponce perdit son effroi, et quand il lui demanda si elle voulait de lui comme mari, voyant qu'il était jeune et beau, elle pensa : « Celui-ci m'aimera sûrement mieux que ma vieille mère-marraine, la Taufpatin », et elle répondit qu'elle le voulait bien, en mettant sa main dans la sienne. Elle ajouta aussitôt : - Je voudrais bien partir avec toi, mais je ne saurais pas comment descendre. Si tu viens, alors apporte-moi chaque fois un cordon de soie : j'en ferai une échelle, et quand elle sera finie, je descendrai et tu m'emporteras sur ton cheval. Ils convinrent que d'ici là il viendrait la voir tous les soirs, puisque pendant la journée venait la vieille. De tout cela, la sorcière n'eût rien deviné si, un jour, Raiponce ne lui avait dit : « Dites-moi, mère-marraine, comment se fait-il que vous soyez si lourde à monter, alors que le fils du roi, lui, est en haut en un clin d'œil ? - Ah ! scélérate ! Qu'est-ce que j'entends ? s'exclama la sorcière. Moi qui croyais t'avoir isolée du monde entier, et tu m'as pourtant flouée ! » Dans la fureur de sa colère, elle empoigna les beaux cheveux de Raiponce et les serra dans sa main gauche en les tournant une fois ou deux, attrapa des ciseaux de sa main droite et cric-crac, les belles nattes tombaient par terre. Mais si impitoyable était sa cruauté, qu'elle s'en alla déposer Raiponce dans une solitude désertique, où elle l'abandonna à une existence misérable et pleine de détresse. Ce même jour encore, elle revint attacher solidement les nattes au crochet de la fenêtre, et vers le soir, quand le fils de roi arriva et appela : Raiponce, Raiponce, Descends-moi tes cheveux. la sorcière laissa se dérouler les nattes jusqu'en bas. Le fils de roi y monta, mais ce ne fut pas sa bien-aimée Raiponce qu'il trouva en haut, c'était la vieille sorcière qui le fixait d'un regard féroce et empoisonné. - Ha, ha ! ricana-t-elle, tu viens chercher la dame de ton cœur, mais le bel oiseau n'est plus au nid et il ne chante plus : le chat l'a emporté, comme il va maintenant te crever les yeux. Pour toi, Raiponce est perdue tu ne la verras jamais plus ! Déchiré de douleur et affolé de désespoir, le fils de roi sauta par la fenêtre du haut de la tour : il ne se tua pas ; mais s'il sauva sa vie, il perdit les yeux en tombant au milieu des épines ; et il erra, désormais aveugle, dans la forêt, se nourrissant de fruits sauvages et de racines, pleurant et se lamentant sans cesse sur la perte de sa femme bien-aimée. Le malheureux erra ainsi pendant quelques années, aveugle et misérable, jusqu'au jour que ses pas tâtonnants l'amenèrent dans la solitude où Raiponce vivait elle-même misérablement avec les deux jumeaux qu'elle avait mis au monde : un garçon et une fille. Il avait entendu une voix qu'il lui sembla connaître, et tout en tâtonnant, il s'avança vers elle. Raiponce le reconnut alors et lui sauta au cou en pleurant. Deux de ses larmes ayant touché ses yeux, le fils de roi recouvra complètement la vue, et il ramena sa bien- aimée dans son royaume, où ils furent accueillis avec des transports de joie et vécurent heureux désormais pendant de longues, longues années de bonheur. FIN