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Quelles solutions

pour cohabiter avec le loup ?

Le triptyque de la protection: clôture, chiens, présence humaine

Des vaches de combat

Plus de chiens, des troupeaux moins grands ?

La technologie à la rescousse

Améliorer le comptage

Plus qu’une clôture, un haut enclos en bois

Des équipes mobiles en renfort

Des techniques d’effarouchement

Réduire la chasse ?

Le tir létal

Des cabanes pour les bergers

Un troupeau à l’abri d’une clôture électrifiée, la présence de chiens et celle d’un humain, y compris la nuit, voilà la base de la protection contre le grand prédateur, admise par tous les acteurs. En France, le document cadre pour la gestion du loup, le Plan national d’action 2018-2023 (ou PNA Loup), prévoit de fortes subventions pour accompagner éleveurs et bergers dans ce sens. -Investissements matériels, comme une clôture électrifiée, à fort voltage;-Gardiennage renforcé (soit par l’éleveur, soit par un berger salarié ou travaillant à la prestation);-Achat et entretien de chiens de troupeau (80%);-Etudes de vulnérabilité des troupeaux;-Accompagnement technique pour améliorer l’efficacité de la protection des troupeaux;Ces mesures peuvent être prises en charge jusqu’à 100% par le ministère de l’agriculture et le Fonds européen agricole pour le développement rural, si la commune se trouve en zone de prédation avérée.

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Le triptyque de la protection : clôture, chiens, présence humaine

Des techniques d’effarouchement

Flandries (fanions aux couleurs vives attachés à des clôtures), fumigènes, détonations, éclairage… Les moyens de faire peur au loup sont variés et les bergers peuvent être amenés à confectionner leurs propres moyens d’effarouchement. Mais les effets sont de durées limitées et variables. L’IPRA (Institut pour la promotion et la recherche sur les animaux de protection) précise que « généralement, ces ʺleurresʺ répondent à un besoin temporaire de protection, leur effet est très souvent limité dans le temps, de quelques jours à quelques semaines. L’enjeu est donc de repousser le phénomène d’habituation en variant la source du ou des stimuli, leur fréquence d’utilisation et leur combinaison ».

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Plus qu’une clôture, un haut enclos en bois

C’est une véritable muraille qu’ont érigée, en 2018, quatre propriétaires d’alpages du côté de Saint-Rémy-de-Maurienne, en Savoie. Un abri en dur pour les moutons et brebis, une palissade en bois équipée de barbelés et une clôture supplémentaire autour de ce « bunker ovin » situé à 1980 mètres d’altitude. Nous rapportions à l’époque le retour d’expérience de la petite forteresse par Henri Didelle, l’un des éleveurs : « Le premier bilan chiffré, il est d’une quinzaine de bêtes tuées sur les 500 moutons et 200 caprins qui sont montés. Le berger, Alain Bougère, était content car les bêtes ont été beaucoup moins stressées grâce au dispositif. Elles ont profité pleinement des alpages ».

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Le tir létal

Le tir létal, pour défendre un troupeau sous la menace, est-il une solution ? C’est le point de désaccord le plus clivant entre défenseurs et détracteurs du loup. Le Caf loup, qui regroupe des organisations syndicales agricoles telles que la FNSEA ou les Jeunes agriculteurs (JA), revendiquait en juin 2020, « le droit de n’avoir aucun plafond de prélèvement ». Justine Fusi, membre du Bureau national des JA en charge du dossier montagne et éleveuse en Haute-Savoie, précise : « On a compris qu’il faudra vivre avec le loup, mais on ne veut plus d’attaques. Il faut réapprendre au loup la crainte de l’homme. Nous demandons que l’on puisse tirer dès qu’un loup est en vue et qu’il va attaquer. On ne veut aucune conditionnalité pour un tir de défense, hormis celle d’avoir mis en place les mesures de protections [enclos, présence humaine et chiens de troupeau, des mesures qui peuvent être financées à 100% par les pouvoirs publics selon la zone, ndlr] ».

A contrario, l’Association pour la protection des animaux sauvages dénonce le côté contre-productif de l’abattage du canis lupus. Pour Richard Holding, chargé de communication à l’Aspas, tirer des loups risque de détruire les meutes. « Cela crée des loups solitaires qui sont à même de chasser les cheptels», déplore-t-il. « Pour une meute bien constituée, il est plus efficace de s’en prendre à des animaux sauvages. Les loups, d'habitude préfèrent chasser les cervidés. Mais un jeune loup esseulé, lui, va au plus simple. Il attaque des brebis. »

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Réduire la chasse au gibier ?

C’est une solution qui ne satisfera pas tout le monde, en premier lieu desquels les chasseurs, premiers concernés. Mais réduire le nombre de cerfs ou de sangliers chassés permettrait de limiter les attaques sur les troupeaux, car selon l’ASPAS (Association pour la protection des animaux sauvages), le loup préfère naturellement s’attaquer aux cervidés. « Laissons revenir la faune. Les loups assurent une régulation saine en s’attaquant aux proies les plus faibles et en laissant les cerfs au patrimoine génétique fort. Et ils peuvent aussi s’en prendre aux sangliers, aux chevreuils, mouflons ou chamois…», explique Richard Holding, de l’association environnementale.

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Des équipes mobiles en renfort

Depuis août 2018, le Parc naturel du Mercantour expérimente un service de bergers mobiles, en appui à des bergers en proie à des attaques. En cas d’épisode de forte prédation, l’éleveur en difficulté peut gratuitement faire appel à un berger, qui viendra en renfort ou pour le remplacer, pour une période de 5 jours maximum. Le PNA Loup, qui prévoit la mesure, précise : « À terme, si l’expérimentation est favorable, 1 à 3 bergers pourraient être recrutés par territoire de parcs naturels de juin à septembre ». Le parc des Ecrins a ainsi bénéficié, durant cet été 2020, de trois bergers expérimentés en renfort.

Sous l’égide de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, une Brigade nationale d’intervention Loup existe depuis 2015, dont l’action a été saluée par le ministère de la Transition écologique et solidaire. Son rôle est d’intervenir dans les « foyers chauds », pour mener des missions de suivi et pour aider sur le terrain à la protection des troupeaux, ce qui peut aller jusqu’à réaliser des tirs.

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Des cabanes pour les bergers

La présence humaine permanente auprès du troupeau est l’un des grands axes de prévention des attaques. La question de cette présence dans des lieux parfois isolés, inhospitaliers et sans infrastructure est donc notamment logistique. Des collectivités locales tentent de répondre à cette question en investissant dans des cabanes à destination des bergers. C’est le cas par exemple à Bourg-Saint-Maurice, en Savoie, qui s’est récemment doté d’un petit chalet sur la montagne communale du Bec Rouge, structure financée en partie par la Région. Une route pour accéder plus facilement aux pâturages du secteur est aussi évoquée.Dans les Hautes-Alpes, le parc naturel régional du Queyras a piloté la mise au point d’une cabane, qui se déplace par remorque ou… par hélicoptère ! Il s’agit de disposer d’un logement au plus près de la situation, aussi mouvante soit-elle.

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Améliorer le comptage

En France, le comptage des loups est assuré par le réseau Loup-Lynx, sous l’égide de l’Office français de la biodiversité. Le réseau se base sur une force de près de 4000 correspondants, issus du milieu agricole, associatif, de l’Office national des forêts, de l’Office national de la chasse, de particuliers… qui mènent un repérage de terrain, comme nous le racontions dans un article début 2019.

Leur chiffre (environ 580 loups à la fin de l’hiver 2020) est une fourchette large. Ce qui n’est pas sans soulever de critiques. « Nous demandons un vrai suivi de l’espèce car nous n’avons pas de comptage exact. La population est sous-estimée, elle est peut-être du double ou du triple dans la réalité », considère Justine Fusi, membre du bureau national des Jeunes agriculteurs, en charge du dossier montagne. Un problème pour cette éleveuse de Haute-Savoie, alors que les tirs de loup autorisés sont justement basés sur un pourcentage de cette estimation (21% en 2020, soit 121 individus).

Quid du suivi GPS ? Relativement rare en France, nécessitant d’importants moyens logistiques pour la capture de l’animal, la pose de collier émetteur sur les loups permet ensuite de les situer presque en temps réel. Les colliers sont surtout utilisés dans le cadre d’études sur l’impact des canidés sur la faune sauvage, comme ce fut le cas pour la première bête concernée, une louve dans le Mercantour en 2009. Dans le même ordre d’idée, le parc a installé en 2020 43 pièges vidéo pour observer le comportement du prédateur sur un territoire de 200 km2.

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Et si nos voisins européens pouvaient nous donner des idées ? L’Italie, où le loup est très présent et n’a jamais disparu, a conservé une culture pastorale où les éleveurs partagent la montagne avec les loups et les ours. Dans le parc naturel des Abruzzes, les bergers suivent des troupeaux qui comptent moins de têtes et sont accompagnés de plus de chiens. Un reportage de France 3 en 2017 montre ainsi un éleveur ayant divisé son troupeau de 1500 brebis en plusieurs groupes, chacun surveillé par un homme et « une demi-douzaine de chiens ». Une idée partagée par Henri Didelle, éleveur à Saint-Rémy-de-Maurienne (voir aussi la solution « Plus qu’une clôture, un haut enclos en bois »). Pour lui, il faut « faire davantage de petits troupeaux, de manière à surveiller plus facilement ».

Plus de chiens...

des troupeaux moins grands ?

Le nombre de chiens compte aussi dans la réduction des attaques, comme l’écrivent les biologistes Jean-Marc Landry, Jean-Luc Borelli et Marine Drouilly dans une récente étude sur les relations entre chiens gardiens de troupeau et loups (en anglais) : « Nous recommandons d'utiliser des groupes de plus de six chiens et de renforcer la présence des chiens dans un rayon plus large autour du troupeau, afin de limiter la présence de groupes isolés de moutons [plus à même d’être la cible de loups, ndlr] et d'améliorer la protection contre les attaques de loups. » Le nombre de chiens permet donc une meilleure surveillance (un chien seul peut ne pas s’apercevoir d’une attaque, cette probabilité se réduit avec le nombre de chiens). Mais les scientifiques ont aussi observé que dans les groupes de six chiens ou plus, ces derniers avaient plus tendance non seulement à poursuivre les loups mais aussi à rester près du troupeau pour surveiller les moutons.Prévue dans le Plan national d’action Loup 2018-2023, la structuration d’une filière chien de troupeau en France est en cours. Le but : organiser l’élevage et le repérage de chiens de troupeaux et permettre leur placement auprès d’éleveurs en fonction des besoins (type d’animaux gardés, type d’environnement où évolue le troupeau…).

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La technologie en renfort

C’est une proposition que le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, a fait mi-novembre : utiliser des drones pour repérer et effaroucher les loups qui pourraient rôder autour d’un troupeau. « On va travailler avec une entreprise de Haute-Savoie et on espère pouvoir commencer dès cet hiver », a-t-il déclaré.Dans le registre « nouvelles technologies », la région a dans le même temps décidé de financer le site Maploup.fr, qui, en recensant les attaques en temps réel, permet aux bergers de s’organiser en conséquence. Les solutions numériques ne manquent pas, tel le site collaboratif Proxyloups.fr, qui fonctionne sur la mise en commun d’informations sur la présence du canidé. L’enjeu de ces applications : adapter sa défense du troupeau (faut-il que le berger passe la nuit avec les bêtes, faut-il augmenter le nombre de chiens sur place…?) en fonction de la présence en temps réel du loup.

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Des vaches de combat

Des chiens pour protéger les troupeaux, on connait. Et pourquoi pas essayer d’autres animaux ? Dans les troupeaux bovins, la solution pourrait venir d’une race particulière. À Gresse-en-Vercors, en Isère, un éleveur de charolaises ayant connu de récentes attaques s’est doté d’une partenaire à cornes et à robe noire, au caractère bien trempé : une vache d’Hérens. Dans un article paru début novembre, nous écrivions que « la vache d’Hérens est de race bovine suisse, robuste, combative, bien connue pour les combats qui lui permettent, à chaque montée d’alpage, de définir de manière naturelle et instinctive la hiérarchie nécessaire à chaque troupeau ». Une vache de combat donc, qui présente de nombreux avantages, commede bien s’intégrer à ses congénères ou d’être, en France, essentiellement élevée dans nos départements de Savoie, Haute-Savoie et Isère, comme nous l’écrivions en 2017.

Concernant la protection des troupeaux, l’IPRA (Institut pour la promotion et la recherche sur les animaux de protection) mentionne aussi les lamas et les ânes, des animaux imposants qui « présentent une aversion forte à l’encontre des canidés » et peuvent alerter sur la présence du loup ou s’opposer physiquement avec lui. Ces animaux seraient plus adaptés pour garder des troupeaux comptant un faible nombre de têtes.

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