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Rapport 2019-2020 de l'observatoire des pratiques en éducation prioritaire (Académie de Créteil)

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OBSERVATOIRE DES PRATIQUES EN ÉDUCATION PRIORITAIRERAPPORT 2020

L'ORAL EN ÉDUCATION PRIORITAIRE

Conclusion

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Pour commencer

Les photographies signées par l'agence CATALPA sont issues du webdocumentaire disponible à www.carnetdinspiration.fr. Il a été réalisé pour l'académie de Créteil de 2017-2019 et dresse le portrait d'acteurs et d'usagers de réseaux d'éducation prioritaire sur notre territoire.

Notre démarche

Introduction

Télécharger les Jalons de l'enseignement de l'oral en éducation prioritaire

L’observatoire des pratiques en éducation prioritaire est une instance de l’académie de Créteil. Cet observatoire a été constitué le 9 octobre 2015. Ses membres sont des cadres des services centraux ou académiques de l’Éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, des directeur(rice)s d’établissement du second degré, mais aussi des membres de fédérations de parents d’élèves ou d’associations. Conformément à sa charte, l’observatoire des pratiques en éducation prioritaire entend croiser les regards sur les Réseaux de l’Éducation Prioritaire (REP et REP+) afin de recueillir, mutualiser valoriser certaines pratiques de terrain. Il a l’ambition de générer une dynamique de questionnement parmi les différents acteurs éducatifs. Ils témoignent des initiatives des réseaux pour la réussite de tous les élèves et peut suggérer des pistes d’action-formation. En 2019-2020, la question de l’oral a été traitée avec le soutien de Mme Sylvie PLANE, professeure émérite de sciences du langage, Sorbonne Université, LaboratoireSens Texte Informatique Histoire (STIH). L’animation proposée appartient à un triptyque de ressources, composé également du texte intégral du rapport 2020 et des Jalons de l’oral, à télécharger depuis la page d’ouverture de l’animation. Ces ressources ont été réalisées sous la direction de M. Alain POTHET, correspondant académique éducation prioritaire. Le texte a été rédigé par Mme Martine AMABLE sous couvert des quarante observateurs concepteurs (liste à consulter en annexes depuis la page d’accueil, icône « Pour commencer »).

Introduction Insaisissable oral [1] Faculté universelle, le langage se déploie au plus intime de la famille. On y verbalise peu ou beaucoup, on y parle avec ou sans accent, on raconte le monde, on en discute, ou bien l’on s’en tient aux préoccupations matérielles et quotidiennes. Ni l’enfant, ni même l’adulte parfois ne se rendent compte de la puissance du dévoilement par l’oral. L’oral expose, situe, dit quelque chose de soi, de l’image que l’on veut donner de soi et de sa propre représentation d’un interlocuteur. L’oral ne permet pas le recul de l’écrit. Lis tes ratures ! [2] C’est là même ce que l’oral interdit, le remaniement silencieux d’un message, d’un récit, d’une opinion. L’oral, plus encore que l’écrit, est un lieu d’insécurité dès lors qu’on se confronte à d’autres, au-delà des familiers ou des pairs. Se préparer à parler, c’est consulter son dictionnaire intérieur, parler c’est aussi interpréter les signaux non verbaux de son interlocuteur, parcourir à nouveau un répertoire personnel et syntaxique pour adapter la suite du message. C’est ensuite écouter une réponse et anticiper la sienne propre. L’oral met ainsi en jeu des opérations d’une insoupçonnable complexité [3]. Il nous contraint à l’ubiquité quand l’écrit nous invite à la pause. Plus, ou mieux voudra-t-on dire, et plus l’opération sera complexe. De celui qui pense à voix haute, on entendra ainsi les hésitations, les amorces, les reprises, le familier à côté du conceptuel. Mais dans tous les cas, l’oral trahit l’émotion, reflète du savoir ou de l’incurie dans l’immédiateté de l’échange. L’oral, apparemment partagé est ainsi plus discriminant et clivant que l’écrit. Mal maîtrisé, il fait stigmate. De cet objet complexe, il appartient à l’école de se saisir, comme outil de socialisation notamment scolaire, comme outil d’enseignement et d’évaluation, comme vecteur mais aussi objet d’apprentissage : comment dire ? Relégué par l’écrit, le travail oral a connu à l’École une histoire à éclipses [4]. Mais, souvent ignoré, il fait retour. « Comprendre, s’exprimer (…) », « communique(r) et argumente(r) à l'oral de façon claire et organisée ; adapte(r) son niveau de langue et son discours à la situation, (…) écoute(r) et prend(re) en compte ses interlocuteurs », être capable d’« effectuer une prestation » orale, pouvoir « exprime(r) ses sentiments et ses émotions en utilisant un vocabulaire précis. (…), apprend(re) à résoudre les conflits sans agressivité, à éviter le recours à la violence » : telles sont, concernant l’oral, les compétences à développer au cours de la scolarité obligatoire des élèves. Elles sont énumérées dans les domaines 1, 2 et 3 du Socle commun de connaissances, de compétences et de culture [5]. Les instructions ou programmes officiels soulignent la place de l’oral dans les apprentissages. Les repères annuels de progression précisent les niveaux de maîtrise attendus. Le « Grand Oral » au baccalauréat évaluera des acquis à la fin des études secondaires. Travailler l’oral fait donc l’objet d’une demande sociale pressante : communication harmonieuse, pacifique et citoyenne, civilité, intégration des enfants issus de l’immigration, performance personnelle et professionnelle. À cette demande, l’École doit répondre. Certes, « ça parle » à l’École. Mais l’oral n’y advient que si « on lui adjoint un objectif d’enseignement /apprentissage (et qu’) on ne réduit pas (la parole) à de la simple communication sociale » [6]. L’oral est au cœur du métier enseignant une pratique capable de faire dire et entendre une maîtrise de la langue et le cheminement d’une pensée adressée, au-delà de la communication. C’est à ce prix que l’École travaille à la montée en qualification mais aussi au renforcement du lien social, de ce qui rassemble et protège en assurant la reconnaissance des uns par les autres [7]. Dès lors, comment favoriser, développer en classe des pratiques de l’oral capables de répondre à cette demande, mais aussi de réduire les inégalités et améliorer les conditions de réussite en éducation prioritaire ? C’est en partant des témoignages recueillis et des pratiques observées que nous tenterons d’apporter une réponse à cette question. Elle a guidé nos travaux cette année et l’observation de dix réseaux REP et REP+ de l’académie de Créteil, visités du 2 décembre 2019 au 5 mars 2020. Ils ont été désignés par les directions académiques de l’Éducation nationale des trois départements de l’académie de Créteil. Parmi eux, six sont situés en Seine-Saint-Denis, deux en Seine-et-Marne et deux dans le Val-de-Marne. À tous leurs pilotes, inspecteurs de l’éducation nationale (IEN), principaux des collèges, inspecteurs d’académie - inspecteurs pédagogiques régionaux (IA-IPR) référents, ont été envoyés la charte et le protocole de l’observatoire des pratiques en éducation prioritaire. Grâce à eux et aux coordonnateurs des réseaux, nous avons observé 68 séances de classes de la maternelle au collège, des temps d’activités des élèves en dehors de la classe habituelle, en ateliers ou au CDI. Nous avons écouté les témoignages de 116 écoliers ou collégiens, 55 parents d’élèves, 97 enseignants, 13 personnes chargées de l’accompagnement social, de santé ou de la Vie scolaire, 29 pilotes, 18 directeurs d’école, 14 coordonnateurs ou conseillers pédagogiques de circonscription et, le cas échéant, partenaires extérieurs. Ils nous ont accordé leur confiance et nous ont le plus souvent permis de réaliser des enregistrements de nos entretiens. Leurs paroles ont donc été très rigoureusement recueillies. De très nombreux enseignants et parents d’élèves nous ont autorisés à filmer des moments de classe et ont accepté ainsi une très inhabituelle exposition. Aux enquêtés comme aux enquêteurs, aux enseignants qui nous ont ouvert leurs classes nous adressons nos plus vifs remerciements, ainsi qu’à M. le Recteur qui a bien voulu nous proposer ce sujet d’étude. C’est à eux tous que nous dédions ce document. Il ne prétend pas à la rigueur scientifique des travaux de recherche universitaires, menés à une échelle plus grande et sur une durée plus longue. Il a néanmoins l’ambition de devenir un outil de travail, d’ouvrir à la discussion des professionnels, enseignants, formateurs, cadres, et de guider la réflexion de la communauté éducative. Il est structuré par quelques questions essentielles. 1. Quelles sont la place et le rôle de l’oral en classe selon les témoignages recueillis ? 2. Quelles sont les pratiques de l’oral au cœur de la classe et quels sont leurs enjeux ? ________________________________________________________________________________ N.B. : Ce fichier Genially ne rend compte que de la partie 2. La partie 1 est accessible par téléchargement du texte intégral du rapport 2020 de l'observatoire des pratiques en éducation prioritaire (sur la page d'accueil). ________________________________________________________________________________ [1]. Jean-François HALTÉ & Marielle RISPAIL évoquent l’oral comme « non objet, (…) espèce d’Objet Verbal Mal Identifié » dans leur ouvrage paru en 2005, L’oral dans la classe. Compétences, enseignement, activités, l’Harmattan, Paris, p.12 et « L’oral : un fantôme omniprésent, ou un cadavre encombrant pour la didactique ? » : c’est ainsi que l’interroge Elisabeth NONNON dans une publication de 1992, in Innovations n°23-24, CRDP de LILLE, pp. 9-22. [2]. Inspiré de l’analyse du discours de réception du prix Nobel de littérature prononcé par Patrick Modiano en 2014, analyse proposée par Michel GRANDATY et Jocelyne GUÉGANO dans une conférence donnée en 2015 à Miélan et intitulée L’oral, objet d’enseignement. Ces derniers évoquent pour leur part la formule « Relis tes ratures ». [3]. Voir schéma, Annexe 6 : commenté par Sylvie Plane lors de sa conférence à l’Institut français de l’éducation (Ifé), il a été conçu par Willem J. M. LEVELT et publié en 1993 dans Speaking from intention to articulation, Cambridge Massachusetts (EU), MIT Press. [4]. NONNON Elisabeth, 2011, L’histoire de la didactique de l’oral, un observatoire de questions vives de la didactique du français in revue Pratiques, 149-150 | 2011, 184-206 [5]. Cf. Annexe 5. [6]. Citation de la p. 23 de Apprendre à parler, parler pour apprendre. L’oral à l’école primaire publié sous la direction Marielle RISPAIL, 2009, Nice, CRDP de Nice éditeur. [7]. Cf. Serge PAUGAM, Le lien social, 2008, Paris, Presses Universitaires de France (PUF)

Adresse électronique : ce.carep@ac-creteil.fr Correspondant académique éducation prioritaire : M. Alain POTHET alain.pothet@ac-creteil.fr Tél. : 01 57 02 68 67 Chargée de mission éducation prioritaire : Mme Martine AMABLE martine.amable@ac-creteil.fr Tél. : 01 57 02 69 95

Conclusion Le rapport 2020 de l’observatoire des pratiques en éducation prioritaire est destiné en priorité aux formateurs. Leur accompagnement sera en effet fortement sollicité à l’approche de l’épreuve de baccalauréat dite du « Grand Oral » qui sera organisée pour la première fois en juin 2021. Notre travail a été réalisé grâce à la collaboration de quarante observateurs. L’effectif est important, à hauteur de l’enjeu, « penser l’oral » afin de produire des ressources et des repères de progressivité, à destination des équipes des réseaux. L’observatoire leur propose également une méthode de recueil de verbatim à analyser. S’ils le souhaitent, les formateurs pourront la transposer dans leur travail avec les professeurs. Ils pourront la mettre en œuvre, à leur tour, dans le cadre d’une réflexion collective sur leurs pratiques. Le sujet d'étude nous a été confié par Monsieur le Recteur de l’académie de Créteil. Nous le remercions vivement pour sa confiance renouvelée. Toute notre gratitude s’adresse également à Mme Sylvie PLANE. En formation, elle a accepté de démêler pour nous l’écheveau « oral » et ses enjeux. Elle a initié nos regards aux observables d’une séance. Nous l’en remercions chaleureusement. Modestement, notre travail a pour but de promouvoir une réflexion sur les pratiques pédagogiques au service de l’équité scolaire et de la réussite de tous. Or, qu’avons-nous constaté ? L’oral représente un temps considérable, de 30 à 75 % d’une séance de classe, selon les élèves. Leur estimation la plus fréquente avoisine les 50 %. Si des disciplines sont souvent citées comme « matières à oral », le français, les langues vivantes, l’EMC, l’histoire géographie à moindre degré, jamais cette liste ne recueille l’unanimité. En vérité, c’est la pratique de l’enseignant qui fait la différence. Dans certains réseaux, les mathématiques, la technologie ou la physique chimie sont identifiées à un oral plus actif qu’ailleurs. A contrario, des élèves, voire des pilotes, parfois se plaignent d’un excès d’écrits dans des disciplines « attendues » à l’oral. Pourtant, si l’on parle beaucoup, les élèves s’expriment parfois très peu. Des pilotes ont plusieurs fois souligné le paradoxe d’une participation fortement demandée, mais aussi très appréhendée. La parole en continu des élèves se trouve alors réduite à la portion congrue. La nécessité d’avancer dans les programmes, mais aussi la crainte aussi de ne pas pouvoir contrôler une parole laissée libre, sont ainsi des obstacles majeurs à l’expression orale de tous les élèves. L’oral prend donc du temps, mais il s’agit souvent de l’oral de l’enseignant. C’est dans les interstices de sa parole que l’élève qui participe alors s’exprime. Mais de son aveu même, l’oral du professeur n’est guère préparé comme tel. Son objectif vise plutôt une notion au programme et l’oral advient « au fil de l’eau » sans que l’enseignant ait déterminé à l’avance un temps de parole. L’oral est alors un outil d’enseignement et non pas un objet d’apprentissage. Le cours est souvent dialogué. Dans le questionnement de l’enseignant, l’élève propose sa réponse. Il suit, ou non, comprend, ou non. L’active participation de quelques-uns peut donner l’illusion d’un apprentissage réussi. Mais le dynamisme des uns peut condamner les autres à un mutisme résigné, en dépit des sollicitations de l’enseignant. En îlots pour réaliser une tâche, les interactions entre élèves sont souvent très limitées. Ils s’efforcent de ne soutenir qu’une prestation orale, celle du camarade qui présentera le travail. On est attentif au contenu, guère à la forme orale. L’assentiment de l’enseignant est recherché, et non pas les formulations qui pourraient expliciter ou mettre en valeur le propos, au bénéfice de tous. D’autres paradoxes sont remarquables. À l’oral, certaines performances sont attendues, quant à la forme et quant au fond. Mais le lexique ou les structures du langage ne sont pas systématiquement apportés en amont, dans le champ du discours à produire. L’élève manquera donc de vocabulaire et de clarté à dire. Surtout, il y a peu de moments de feed-backs et de métacognition. L’oral est donc trop peu un outil pour penser, s’approprier, s’améliorer. L’observation a montré qu’il est rarement objet d’apprentissage en cours. Certains enseignants ne le conçoivent qu’en projet. L’un d’eux l’a pourtant exprimé au fil de la discussion : ce qui est réalisé alors pourrait l’être aussi en classe au quotidien. Mais cela suppose que l’enseignant s’y autorise et conçoive le programme comme une invitation à travailler des compétences, plutôt que comme une injonction à épuiser son contenu didactique. Cependant, cette liberté de l’enseignant existe. Elle s’accompagne souvent de l’ambition de voir l’élève gagner en maîtrise pour s’émanciper. En retour, la classe se mobilise avec sérénité. De tels moments montrent des élèves s’interroger, coopérer pour produire un oral, et non pas une production écrite à verbaliser. Ils ont des consignes précises qui ont été reformulées. Leur enseignant s’est tu après les avoir indiquées. Mais il se déplace pour accompagner les élèves en difficultés. Il questionne et met en discussion. Il a prévu un temps suffisant pour la restitution. Elle suscite une analyse critique bienveillante de la part de pairs. Avec leur professeur, ils ont établi à l’avance des critères de réussite, tous explicités. Le sens et la spécificité de l’exercice par et pour l’oral ont été exprimés et compris. Le professeur n’a plus guère à contrôler. Il a instauré des règles, a enseigné en amont, apporté le vocabulaire et les documents nécessaires. Son langage est modélisant, a banni les digressions. Il a ritualisé des moments de production : l’oral prend corps pour les élèves. Si un genre est particulièrement visé, comme l’interview et l’exposé, le professeur fractionne les compétences à acquérir. L’exercice n’est pas à faire à la maison et l’élève, en classe, s’exerce à plusieurs reprises avant l’évaluation des compétences orales visées. Elles sont connues de tous. Elles sont spécifiquement commentées sur les bulletins scolaires et auprès des familles. De telles pratiques paraissent difficiles à mettre en œuvre lorsque le Socle commun de connaissances, de compétences et de culturen’est pas intégré. Avec le Référentiel de l’éducation prioritaire, il propose des entrées dans les programmes. Ces derniers offrent alors l’occasion d’atteindre des objectifs souvent transversaux. La maîtrise de l’oral en contextes en fait partie. Viser cette maîtrise est une urgence pour des élèves qui, accents mis à part, méconnaissent le caractère profondément discriminatoire de l’oral. Pour beaucoup, et des plus investis, préparer un écrit très rédigé pour le dire, adopter une certaine tenue vestimentaire et un certain registre de langue, suffiront à la réussite. Souvent vraie au DNB, elle est moins assurée à des examens ultérieurs ou à l’issue d’entretiens professionnels. Penser l’oral est un impératif dans la lutte contre les inégalités scolaires. De nombreux professeurs des écoles maternelles ont en ce domaine une expertise peu partagée. L’écrit relègue l’oral au second plan, parfois dès le CP. Pourtant l’oral est toujours à construire, hors et dans son tissage avec l’écrit, dans un paradigme des apprentissages plutôt que de l’enseignement. Seul un collectif enseignant peut y parvenir pour tous les élèves d’un réseau. Nous n’ignorons pas le temps à passer à l’inventaire et à la réflexion sur les pratiques. Mais nous n’oublions pas non plus la sécurité, le mieux-être que les professeurs et leurs élèves peuvent en retirer. La mise en œuvre de paliers de progressivité sur l’oral peut s’appliquer à différentes conduites discursives des élèves : raconter, décrire, expliquer, définir, reformuler, argumenter, démontrer, justifier, débattre, résumer, synthétiser, prescrire. Plusieurs activités langagières – nommer, qualifier, opposer, rapprocher, catégoriser – permettront sans doute leur développement. Notre rapport a ainsi l’ambition de s’inscrire dans le réel de la classe afin de mieux servir les formateurs et, par leur intermédiaire, les enseignants. Nous les remercions de nous avoir reçus et accueillis dans leurs classes. Notre synthèse n’est riche que des expériences qu’ils nous ont offertes et des témoignages que nous ont livrés les familles, les élèves, les pilotes et autres personnels de la communauté éducative. À eux tous, nous dédions ce travail.

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Annexes

Des mots pour le dire

Des retours pour progresser

Transmettre et dialoguer pour apprendre par et pour l’oral

Pour mieux lire la transcription des échanges oraux, télécharger la signalétique de transcription choisie

DES MOTS POUR LE DIRE

Développer son langage

De la mise en voix à l’éloquence

Du langage pour raconter

Développer son langage

Créer des situations pour permettre à l'élève de...

Se familiariser avec de nouveaux mots

Connaître différentes structures syntaxiques et les utiliser en situation

Être conscient de la polysémie des mots, connaître le vocabulaire spécifique des différentes disciplines, disposer de tournures et de stratégies pour guider la compréhension de l’interlocuteur

1

2

3

Créer des situations pour permettre à l'élève de se familiariser avec de nouveaux mots

Pour les parents, « avoir du vocabulaire, c’est important pour les enfants », mais certains en arrivent très dépourvus à l’École. Au collège, des mots de la langue courante restent méconnus : des enseignants, de pilotes, des personnels de Vie scolaire s’en plaignent. Des professeurs accueillent à la Maternelle des enfants qui sont très inégalement entrés dans le langage. Comment les enfants sont-ils invités par leurs professeurs à rencontrer les mots ?

1. En atelier en Grande Section

2. En atelier en Petite section

À l'école maternelle

  • Le contexte
  • Un extrait des échanges en classe
  • L'analyse de la séance

  • Le contexte
  • Un extrait des échanges en classe
  • L'analyse de la séance

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S3C

À huit élèves de Grande Section, une maîtresse en atelier présente des étiquettes qui représentent des personnages de l’album Valentine aime les comptines. L’enseignante montre le portrait de Noé, le chimpanzé (qui) cherche son goûter.

P Est-ce que quelqu’un se rappelle des personnages de Valentine ? E Le singe P C’est pas le singe, c’est le chim...panzé E Oui le chimpanzé

Que le chimpanzé soit un genre de singe n’est pas explicité. Une étiquette après l’autre, on verbalise : « Lorie la souris », « Jojo le lionceau », « Léon le cochon », « Edouard le loir », « Garou le Loup », « Josette la chouette », « Andréa, le boa ». On travaille sur des animaux, certes humanisés. La catégorie n’est pas explicitée. D’autres étiquettes permettent reconnaître des attributs des personnages sous forme de question/réponse : « mi...roir », « bam...bou », « na…seau ». Ces deux derniers mots ne sont pas aisément réutilisables. Cette séance de phonologie et vocabulaire a épuisé deux piles d’illustrations. La participation des élèves a été assez réduite.

C’est un matin dans une classe d’une vingtaine d’élèves en Petite Section. Un gros objet rouge a été abandonné sur une table et attire l’attention.

N.B. : Code couleur : passage remarquable commenté dans l'analyse de la séance. __________________________________________________________________ Un gros objet rouge a été abandonné sur une table un matin et attire l’attention. Élève C'est quoi ? Autre élève Une valise Plusieurs élèves [plus ou moins en canon] - Valise -Valise Que contient la valise exactement ? Un effet de surprise, une attente sont suscités par l’enseignant qui annonce : « Tout le monde va le faire, habiller la mascotte. Un groupe avec moi ! ». La valise est ouverte. Pièce après pièce, on en reconnaît le contenu. Élève Chaussure Professeur Comment tu sais que c'est une chaussure Élève a des [aci] P Ah ! parce ce que je vois les... Elèves [en choeur] lacets P Les lacets, vous y êtes, les lacets xx les lacets xx ah, mais ça on connaît parce que nous on a la chanson aussi Plusieurs élèves * ** P Rappelle-toi Loulou, les chaussures Élève Ah moi j'ai dit chaussettes P Des chaussures et ça des chaussures Élève Chaussettes P [à un autre qui montre un poupon de chiffon] À tous [Sur du babillage] On va le toucher après, Loulou On va s'asseoir un p'tit peu, Ka¨¨s, on va s'asseoir, on va tous le manipuler après. On va le laisser là, on va le laisser là xx et x c'est Exhaussé qui m'a dit tout à l'heure, ça m'a intéressé xx. À côté de moi Mélanine, oui Joël ? Elève Pyjama ### ## : le professeur aide un élève à se moucher Elève Et des habits, y a des habits P Exhaussé, Abdellah, je sais que ça vous plaît, il faut rester un petit peu assis, après on va se lever. C'est Exhaussé qui m'a dit tout à l'heure Elève [Vali] rouge P Valise Même élève Valise P La valise E f À la campagne y a des valises P À la campagne, c'est où ? E fille (f) C'est une maison P C'est une maison. La maison de qui ? E garçon (g) Du voyage Ef De Papy et Mamy P Ah de Papy et Mamy. Donc ça c'est une valise et ça tombe bien elle est Elèves (en choeur) Rouge P Elle est rouge la valise Plusieurs élèves - Rouge - Rouge P Et bientôt, on va faire la journée rouge bientôt. On a fait la journée bleue, bientôt on va faire la journée rouge. Abdellah, tu es déjà prêt pour la journée rouge ? E Abdellah Ouais P [sur quelques babillages] Oui. Oui. Oui. Regardons un p(e)tit peu. Ah, tu m'avais dit aussi autre chose Exhaussé, tout à l'heure E Ah ouais valise P C'est pour quoi faire la valise ? Plusieurs élèves -** -** - {zabit} P Tu as entendu Marley, aussi, parce que si nous on n'entend pas les copains x Écoutez Exhaussé, il nous a dit x c'est pour partir en voyage E voyage Autre élève voyage P Mais je suis d'accord avec Naïs, c'est pour E Naïs [chuchotant] partir en voyage P Ah non il nous a dit quelque chose de très simple x c'est pour ranger, une valise, c'est pour ranger quoi ? Plusieurs élèves - Des habits - Des habits P Des habits, les vêtements. Alors regardons un p(e)tit peu ce que nous avons dans notre valise [# Quelques adresses à des élèves occupés à d'autres activités] Elève {Bonné} P Ça c'est... Plusieurs élèves Un {bonné} P Un bonnet Élèves (en choeur) Un bonnet, un bonnet P Doucement *** ! Hawa, tu as entendu ? C'est quoi ? Hawa Un bonnet Elèves - Un bonnet - Un bonnet P Un bonnet. # [Babillage] Élève Un slip Autre élève Un slip Élève Un slip x Une cravate Autre élève Une écharpe P Ah je sais pas. Ethan, montre-nous x Peut-être que si on mettait Autre élève Écharpe P Peut-être que si on mettait, peut-être qu'on verrait ... Elève *** P Peut-être qu'on verrait xx si c'est une écharpe, un slip, ou quoi. Comment on met, toi tu penses, l'écharpe ? Elève < > P [sur quelques babillages] [en chuchotant] Montre-nous Loulou. Assis, assis, Joël, il faut rester assis parce que sinon, les copains, i(ls) voient pas. Regarde, Marley s'est déjà levé pour voir. C'est bien Loulou ! Trésor, regarde Loulou, regarde avec nous. Ah, tu mets tout autour comme ça. Voilà ! Elève Ouah ça tourne Autre élève Ça tourne Autre élève Écharpe Autre élève Une écharpe P Une écharpe Élèves [en choeur et en canon] - Une écharpe - Une écharpe - Une écharpe P Une écharpe, Mohammed-Amin Autre élève Écharpe P Mohammed-Amin, j(e) t’entends bien d'habitude Autres élèves - Écharpe - Écharpe - Une écharpe P Une écharpe. Kaïs, tu as entendu. Une écharpe. On va allez un p(e)tit peu plus vite, après on va le faire ensemble Autres élèves -Y s'appelle, y s'appelle ** -Y s'appelle, y s'appelle ... P C'est quoi ça ? Regardez Sarah, elle lève le doigt Autres élèves *** E Sarah Pantalon P Un pan- j'ai entendu-là ? Autre élève panton Autre élève talon P Un pan... Élève talon Autre élève pantalon P Un pantalon Élèves en canon - Pantalon - Pantalon - Un pantalon

La séance travaille la phonologie, le vocabulaire et explore le champ sémantique des vêtements. Les mots sont réutilisables chaque jour en famille. L’enseignant peut encourager le père ou la mère à les redire avec son Petit, au moment de l’habillage, ou du rangement des placards. Cet oral du savoir est réalisé dans la continuité d’expériences déjà personnelles qu’évoquent librement les élèves : on prend des valises pour aller chez Papy et Mamie. Il y en a, chez eux, à la campagne. L’enseignant, bienveillant, sollicite avec délicatesse - « Mohammed-Amin, j(e) t’entends bien d'habitude » - suggère avec tact - « Peut-être que si on mettait, peut-être qu'on verrait ...» - rappelle avec gentillesse - « Trésor, regarde Loulou, regarde avec nous » – fait entendre les règles en douceur : « Regardez Sarah, elle lève le doigt ». Chacun a pris part à un échange très tranquille. Le professeur chuchote beaucoup et crée une situation d’apprentissage et de socialisation où la classe est un espace de sécurité et de confiance réciproque pour apprendre : « Montre-nous ! ». On fait éprouver à l’élève la nécessité d’un mot plutôt qu’un autre. C’est en faisant essayer une pièce de vêtement qu’ « écharpe » s’impose, plutôt que « cravate ». On apprend déjà la rigueur en termes de vocabulaire.

Domaine concerné du Socle* et compétences travaillées - Domaine 1 : les langages pour penser et communiquer (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant la langue française à l'oral et à l'écrit. (L’élève) emploie à l'écrit comme à l'oral un vocabulaire juste et précis. * Socle commun de connaissances, de compétences et de culture : extraits du texte concernant l’oral en annexe 5

Connaître différentes structures syntaxiques et les utiliser en situation

En termes de syntaxe, le langage des professeurs dans les deux degrés n’est pas toujours modélisant, loin s’en faut. S’il n’est guère gênant que les négations ne soient pas complètes - c’est un phénomène courant à l’oral - en revanche, on a pu constater que le langage de l’enseignant s’éloigne parfois du modèle attendu avec des questions posées aux élèves comme : « On se rappelle pu ? » « Va me dire c’est quoi ça ? ». Or, les séances d’enseignement consacrées explicitement à la grammaire et à la syntaxe ont été très peu nombreuses, en Français comme en Langues vivantes. Dans les autres disciplines, les enseignants ne corrigent pas d’emblée les erreurs des élèves dans ces domaines, mais reformulent parfois les propos, pour ne pas décourager la participation. Quelles difficultés peuvent surgir ? Comment accompagner les élèves dans le repérage de structures syntaxiques ?

1. Au collège, la correction d'un exercice révèle les difficultés

2. Plus tôt dans la scolarité, à l'école élémentaire, des séances d’apprentissage de la grammaire française

  • Le contexte
  • Un premier extrait des échanges en classe
  • Première analyse : le dévoilement d'un malentendu
  • Un second extrait des échanges en classe
  • Analyse du second extrait : le renvoi à la nécessité d’apprendre, y compris sans comprendre

  • Le contexte
  • Un extrait des échanges en classe
  • L'analyse de la séance

2

S3C

Dans une classe de 6ème en anglais, des élèves corrigent ainsi un exercice « à trous » sur les pronoms. Il s’agit de compléter la phrase : « This is Crookie. … are friends ».

N.B : Ce qui est inscrit au tableau est surligné en bleu. E3 [fille : f] This is Crookie. *** are friends P Speak up, please, speak up ! E3f [qui parle encore très bas] This is Crookie. They are friends P xx So xx uh who is Crookie ? A boy E [en choeur] No P No, it’s not a boy ! May be it's a girl ? Plusieurs élèves - No - No - No P It’s not a girl so. Yeah ok x what is it ? Is it a cat ? Plusieurs élèves - No - No - No P No, so. It’s a…, it's a… Deux ou trois élèves - A dog - A dog P It’s a dog ! So it’s not a boy, it’s not a girl, it’s a girl. So is it he, the pronoun ? Plusieurs élèves - No - No - No P Is it she ? Plusieurs élèves - No - No Plusieurs élèves - It - It P It, good ! So, can you repeat please ! E3 f This is Crookie. Max *** P écrivant au tableau Max. This is Crookie… Oh yes. Crookie, ok, we are going x a bit x to fast here xx just a minute. This is Crookie … Crookie uh Crookie. Here, but, may be /a, the/ problem here x well x a problem **. You see here : is it possible it x here ? Plusieurs élèves - No - No P Look, we’ve got “are”, so ... ? E4 They P Who is they ? Crookie and who ? E // P Crookie and… E4 *** P No x yeah ? E5 Crookie and Max P [écrivant] So, yes but, Max is- Max is uh speaking. So Max, Max, Max This is Crookie… are friends. Si c’est Max qui parle, là x Max and Crookie, ça va être ? Le pronom serait quoi ? E4 They E5 [garçon : g] Didier ? We P [écrivant au tableau] We, off course we We are friends, yes. We are friends. Euh, qui parle dans la phrase ? Comment vous savez que c’est Max ? E6 Parce qu’i(l) y a des points. P Donc Max and Crookie are friends. We are friends. Ok ? Number d...

La correction de l’exercice dévoile un malentendu. L’origine en est peut-être la phrase même de l’énoncé. Il est libellé ainsi : This is Crookie. … are friends, et non pas Max : « This is Crookie. … are friends » et encore moins : Max says : « This is Crookie. … are friends ». La fille qui répond en premier se trompe, du point de vue de l’enseignant. Mais si l’on considère que des images de Max et Crookie illustrent le manuel, on peut comprendre que du point de vue du lecteur, Max et son chien Crookie sont amis (They are friends). Le professeur ne reconnaît pas immédiatement la source de l’erreur et questionne afin de faire trouver les pronoms correspondant aux genres (masculin, féminin, neutre), avant de s’apercevoir que le problème n’est pas là. « We are going a bit to fast », dit-il. Mais, embarrassé, sans doute, il n’explicite pas le cheminement de sa pensée qui aurait été formateur pour les élèves. Il passe au français : « Si c’est Max qui parle, là x Max and Crookie, ça va être ? Le pronom serait quoi ? ». Mais un élève persiste dans la réponse erronée. Un autre sauve apparemment la situation en donnant la bonne réponse. Mais on passe à l’exercice suivant sans autre forme de procès. Un mystère demeure avec deux implicites laissés en l’état, celui du manuel, d’une part, et celui de l’enseignant, d’autre part. Il n’a pas ni verbalisé ni expliqué sa mécompréhension de l’erreur. Elle n’a été profitable à personne. Le problème ressurgit à la fin de la séance quand le professeur demande si des moments de la séance n’ont pas été compris. Le moment témoigne de la gêne que des observateurs ont pu causer en classe. Elle contribue sans doute à expliquer l’embarras de l’enseignant, sous le coup de l’émotion.

Une séance est menée en CE1 avec un groupe de 14 élèves. Elle montre une enseignante attachée à ritualiser des activités et les rendre particulièrement lisibles pour ses élèves. La séance commence par un travail collectif sur la première phrase d’un petit texte collé dans le cahier.

N.B. Code couleur : passage remarquable commenté dans l'analyse de la séance. P Allez, qui commence ? Elie, c’est parti ! On fait la première phrase ? E1 Elie [une fille] Quand j’étais une petite fille j’habitais un petit hameau dans la campagne P [+en ébauchant de ses mains la forme d’une maison] Très bien : Quand j’étais une petite fille j’habitais un petit hameau -vous vous souvenez, hein petit hameau+ - dans la campagne. Dites-moi ! xx Ah non je ne dis plus rien, je vais vous écouter E3 Jeanne J’étais : on va entourer le j apostrophe P On entoure le j apostrophe. Plusieurs élèves - Oui - Oui - Oui P Vous êtes sûrs ? Plusieurs élèves [mais un peu moins nombreux] - Oui - Oui P à Mélie [qui a mis un ongle à sa bouche et paraît embarrassée] [Des doigts se lèvent] à E13 [fille : f] Non Mélie, tu n’es pas d’accord ?Tu as le droit de ne pas être d’accord. Alors qu’est-ce qui te fait hésiter ? J apostrophe, tu r(e)gardes ton affichage. Est-ce un pronom ? Ce n’est pas un pronom sur l’affichage ? Tu prends la règle et tu montres ? Tu l’as trouvée la règle ? Tu ne ressembles pas à la maîtresse hein. E13 montre une silhouette solitaire correspondant au “je” sur un affichage qui compte 6 pages A4 plastifiées correspondant à “je, tu, il(elle), nous, vous ils (elles”. Les pronoms sont représentés par des silhouettes (ex. le “tu” par une qui en désigne une seule autre face à elle) P À toi, Jeanne E3 Jeanne Dans j’habitais on entend le j apostrophe P Dans j’habitais on entend le j apostrophe, qu’est-ce qu’on a… Afsa E7 Afsa [qui a levé le doigt] ** faut souligner les verbes P [Des doigts se sont levés] P [avec un regard circulaire sur le groupe] Ah ! Très bien, on parle du verbe. Quel est le verbe ? Quel est le premier verbe ?J'étais une petite fille : quel est le verbe dans la phrase ? Avant de donner la réponse que faites vous pour repérer les verbes ? Que faites-vous ? E13 Mina ? [un garçon] <...> P [montrant du doigt l’élève qui vient de répondre à voix basse] Alors, qui peut reformuler ce qu’il vient de dire ? Faire la phrase. (Il) faut reformuler, elle a une idée en tête, une bonne idée en tête. Abibatou ? E9 Abibatou ** phrase négative P On fait une phrase négative, phrase négative. On transforme une phrase x affirmative ou déclarative en phrase... E9 Abibatou affirmative Plusieurs élèves [en choeur] - Négative - Négative - Négative - Négative P Ok, c’est bien, est-ce que tout le monde a trouvé l(e) verbe ? Oui ? Alors quand j’étais une petite fille Plusieurs élèves - Oui - Oui P [à voix basse car Antoine est à côté d’elle] Oui ? Ça va Maty ? Oui. Alors quand j’étais une petite fille. Quel est le verbe ? Antoine… Une phrase, tu me réponds E2 Antoine <...> P Alors, ma question c’est : quel est x le verbe x dans la phrase ? Tu vas y répondre, justement E2 Antoine ** étais P Le verbe est étais. Êtes-vous d’accord ? Élèves [en choeur] - Oui - Oui - Oui P De quel verbe s’agit-il ? Une E (qui ?) désignée Être P De quel verbe s’agit-il ? Il s’agit du verbe être. Bravo ! Le verbe être, très bien. Et on entoure la terminaison E13 a.i.s P [doigts levés] Allez, on continue. J’habitais un petit hameau dans la campagne. Téjeanne. J’habitais un petit hameau dans la campagne. Que vas-tu chercher ? E 11 Téjeanne // P Que vas-tu chercher à ton avis ? E 11 Téjeanne [qui gigote d’embarras] // P [se tournant vers E1] Nawel, que vas-tu chercher ? E1 Nawel Chercher <...> terminaison P Alors, si cherche la terminaison, c’est-à-dire qu’avant, on va chercher … ? E [Qui ?] On va chercher le verbe P On va chercher l(e) verbe. Très bien, quel est l(e) verbe Téjeanne ? xx Dans cette deuxième partie de phrase, Téjeanne : J’habitais un petit hameau dans la compagne dans la campagne, pardon E11 Téjeanne ** habitais P [tournée vers E4 alors que plusieurs élèves lèvent le doigt] Le verbe est habitais. Quel est ce verbe ? De quel verbe s'agit-il Ibrahim ? Il vient de nous dire que c’était ha.bi.tais. De quel verbe s’agit-il ? E4 // P alors que plusieurs doigts sont levés Alors, j’habitais, j’habitais un petit hameau dans la campagne, vas-y E4 <...> P [tournant plusieurs fois la tête de droite à gauche puis de gauche à droite pour parcourir la classe du regard] On dit le contraire. E4 Ibrahim <...> P [avec un mouvement de tête vers E11 à l’opposé, puis vers Ibrahim] Je n’habitais pas un un petit hameau dans la compagne, campagne, pardon. Quel est le verbe, alors ? C’est le verbe habitais, il a raison, de quel verbe s’agit-il ? E4 Ibrahim // P toujours assise /Je vais, je devrais/ p(eu)t-êt(r) l’écrire au tableau [Silence. Plusieurs doigts levés avec vigueur] P Oui Marouane ? E2 Marouane [qui ne levait pas le doigt contrairement à sa voisine, apparemment très active] <...> P Comment ? E2 Marouane [qui chuchote, tout près de la maîtresse] <...> P [s’adressant à E4 Ibrahim] Habiter, c’est le verbe habiter. Très bien. Qu’est-ce que- tu as trouvé Ibrahim, tu vois ou pas ? E4 Ibrahim [qui a hoché la tête puis a parlé très bas] Oui P Quelle est la terminaison ? Chayenne ? E14 Chayenne La terminaison- la terminaison c’est a.i.s P [qui se déplace dans la classe] a.i.s. Ibrahim, Omar, tu as entouré ? xx Alors, vous avez compris comment on travaille. Alors la on s(e) laisser xx on n’a plus beaucoup d(e) temps xx on va on s(e) laisser à peu près sept minutes. Vous allez travailler à deux. Vous allez continuer à entourer les pronoms, j apostrophe ou je, et les terminaisons. Très bien, on va aller- très bien, mettez vos cahiers comme ça x on va aller jusqu’à xx vous allez jusqu’à maîtresse, c’est-à-dire la fin du premier paragraphe. Est-ce que tout le monde voit le mot maîtresse ? Oui ?

Ce moment collectif témoigne d’habitudes de travail très ancrées, voire de rituels. Les élèves répondent à une demande très ouverte – « Dites-moi ! xx Ah non je ne dis plus rien, je vais vous écouter ». Ils rappellent un protocole devenu ordinaire. À chacune de ses étapes – identifier et entourer le pronom, le verbe, la terminaison du verbe, l’enseignante recueille la proposition des élèves et indique comment procéder en cas de doute. L’affichage mural fait recours. Une élève montre le chemin vers la ligne utile. Des élèves rappellent les étapes d’un travail inlassablement questionné par l’enseignante dans un langage modélisant : « On va chercher l(e) verbe. Très bien, quel est l(e) verbe ? », Comment s’assurer qu’il s’agit d’un verbe ? Une élève rappelle la méthode. « Quel est ce verbe ? ». L’enseignement de la maîtresse répond à une grande difficulté des élèves de cet âge : distinguer le verbe du nom. Ils acquièrent des réflexes grammaticaux sur des éléments essentiels de la langue. Les réponses de l’un, reformulées par un autre, assurent de la compréhension du protocole et de structures linguistiques. La suite du travail les met à l’épreuve dans un travail en binômes. Il permet à l’enseignant d’accompagner les élèves les plus fragiles, de vérifier leur acquisition et d’observer les initiatives des élèves. Ils en rendront compte explicitement à deux moments de métacognition (cf. Infra. Partie 3). L’enseignement, très structuré, a offert beaucoup de sécurité et de tranquillité aux élèves de la classe, au point qu’ils se sont montré capables d’oublier trois observateurs et une caméra vidéo.

Il semble que l’élève n’ait pas compris « We, parce que Crookie, c’est un chien ». Est-ce le nous qui est choquant pour l’élève, parce que Max et Crookie sont de deux espèces différentes ? Ou est-ce encore « they » qui paraîtrait plus logique à l’élève ? L’enseignant relance comme si ce ne pouvait pas être l’origine du problème : « Et quoi ? ». L’élève déplace alors sa demande sur le verbe. Mais la conjugaison rappelée par l’enseignant dessine un équivalent : « we are », mais aussi « they are ». Cela n’éclaire toujours pas la source du problème, faute d’explicitation de la difficulté initiale [1]. Lorsqu’un élève ose dire « Moi, les pronoms, j’arrive pas à les ret(e)nir », il est renvoyé à la nécessité d’apprendre, y compris sans comprendre. Il n’y a plus de questions à la fin. Les élèves ont-ils renoncé à questionner ? [1] Sur ce point, voir infra le thème "Des retours pour progresser", au champ de pratiques "Proposer un modèle et des perspectives de progrès", jalon 3 : "Choisir le moment de correction, exploiter, signaler les formulations et les opérations langagières ou spontanées intéressantes (reformulations, explications)"

P Any questions ? No questions ? No ? Est-ce qu’il y a eu quelque chose qui a été fait qui n’a pas été compris ? Là j(e) vous trouve particulièrement silencieux. Je sais que ça peut être intimidant se retrouver avec cinq adultes, ou sept là, mais … Non, sérieusement ? Non ? Oui ? E8 [fille : f) Le- le c. P This is Crookie. We are friends. Qu’est-ce que tu comprends pas ? E8 f We, parce que Crookie, c’est un chien. P Tout à fait d’accord. Et quoi ? E8 f Are. P On peut euh… Can you conjugate the verb be in the present temps ? [sic] E8 f Euh P Conjugate : I... E8 f I x am. I am, you have P Be, be E8 f I am, you are euh they- E9 f <...> Moi, les pronoms, j’arrive pas à les ret(e)nir P Well, you have to. You have no choice. T’as pas le choix, il faut que tu les apprennes. Euh, i am, you are, she is, he is, it is, we are, you are, they are, good. Qui parle ? Qui parle de qui ? Crookie, yeah. Quelle personne ? Est-ce qu’il y a quelqu’un d’autre euh, un autre animal qui est présent dans la phrase ? E (Qui ?) Son ami P Ah ok, j’ai compris. C’est friends qui t’induit en erreur. Non euh, Max, i(l) dit simplement que Crookie et lui- lui est ami avec Crookie, donc, nous sommes amis. We are friends. Ok ? Is it clear ? Euh, now- No more questions ? E No

Domaines concernés du Socle* et compétences travaillées - Domaine 1 : les langages pour penser et communiquer (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant la langue française à l'oral et à l'écrit. (L’élève) utilise à bon escient les principales règles grammaticales et orthographiques. Il emploie à l'écrit comme à l'oral un vocabulaire juste et précis. Dans des situations variées, il recourt, de manière spontanée et avec efficacité, à la lecture comme à l'écriture. - Domaine 2 : les méthodes et outils pour apprendre En classe, l'élève est amené à résoudre un problème (…). Il doit (…) prendre la parole (…) s'entraîner en choisissant les démarches adaptées aux objectifs d'apprentissage préalablement explicités. (…) . Organisation du travail personnel L'élève (…) comprend le sens des consignes . Coopération et réalisation de projets L'élève travaille en équipe, partage des tâches (…). L'élève sait que la classe, l'école, l'établissement sont des lieux de collaboration, d'entraide et de mutualisation des savoirs. Il aide celui qui ne sait pas comme il apprend des autres. (…) * Socle commun de connaissances, de compétences et de culture : extraits du texte concernant l’oral en annexe 5

Être conscient de la polysémie des mots, connaître le vocabulaire spécifique des différentes disciplines, disposer de tournures et de stratégies pour guider la compréhension de l’interlocuteur

Le vocabulaire spécifique est « parfois difficile à acquérir » et la polysémie des mots freine la réussite de nombreux élèves. Des enseignants du Second degré surtout l’ont souligné. Nous l’avons constaté. Parfois, des difficultés surviennent parce que le vocabulaire spécifique n’a pas été enseigné, ou n’a pas été réutilisé.

2. Le vocabulaire spécifique évoqué et non pas enseigné : un exemple à lécole élémentaire

3. Apprentissage ou révision du vocabulaire spécifique et de mots plus ordinaires : un exemple en cours de musique en 6ème

  • Le contexte
  • Un extrait des échanges en classe
  • Bilan

  • Le contexte
  • Un premier extrait des échanges en classe
  • La suite de la séance
  • Un second extrait des échanges
  • Bilan

1. Un exemple de difficulté rencontrée : Le témoignage d'une professeure d'espagnol

3

S3C

En CM1, par exemple, une classe est invitée au voyage. On fera comme si on allait à New York pendant une heure. On partira du collège. Pour prendre l’avion à Roissy-Charles-de-Gaulle, on prendra les transports en commun. Un plan du RER francilien est distribué aux élèves qui doivent rechercher l’itinéraire. Le document mérite identification. Les élèves pensent à un plan ou à une carte. Ils sont interrogés mais leurs explications sont peu claires.

Professeur C'est plutôt un plan ou c'est plutôt une carte ? Élèves - Une carte - Un plan - Une carte - Un plan Professeur Est-ce que quelqu'un peut expliquer la différence entre les deux ? Élève < > Professeur Ilyès ? Ilyès Un plan, c'est c'est le la le c'est une ... La carte, c'est un grande carte où il y a plusieurs chemins et un plan c'est là où il y a la ville xxx la ville Professeur Est-ce que le mot plan on en a besoin quand on part vers une nouvelle destination ? Élèves - Euh x - Oui x - Non. Professeur On a besoin du mot plan ? Élèves Non Professeur Est-ce que c'est un mot qu'on va utiliser quand on va partir euh… en voyage Élèves Non... Professeur Et la carte ? Professeur Oui donc on va noter alors. Et Vanessa a utilisé le mot station. On va le rajouter.

Les mots clés sont simplement notés au tableau. Aucune définition n’est finalement donnée. Un peu plus tard, pour localiser les Etats-Unis par rapport à la France, le professeur projette un planisphère, « une carte », dit-il. Le premier mot n’est pas prononcé, le second reste indéfini. Dans un cours plein d’entrain et qui mobilise les élèves, une occasion a été manquée, dans le feu de l’action.

En 6ème, un cours de musique très vif enrôle tous les élèves. Il commence par un entraînement qui mobilise l’attention, le corps et le souffle. Au détour d’un exercice, le professeur longe son piano, s’arrête, interroge.

Professeur (P) Comment s’appelle cet instrument ? Elève (E) 1 Sonia Un piano P [mi-enjoué, mi-moqueur pour souligner l’évidence de la réponse] Oh, ouah, quel talent ! Han, oh là, là, il est trop fort P [pianotant aux deux extrémités du clavier au fil de la question] J(e) me souviens plus, si j(e) joue ici xx la hauteur des sons, là (je) me souviens plus xx Est-ce que vous pouvez m(e)dire xx la hauteur de ces sons-là ? Sonia À gauche, c’est grave, et à droite, c’est aigu P Et au milieu, c’est quoi, Sonia ? Sonia C’est moyen P [alors que d’autres élèves lèvent le doigt] Ah tch-tch-tchut E2 [désigné de la main car il lève le doigt] Médium P Médium P montrant le clavier de gauche à droite Grave, medium, aigu. Ça c’est sur un piano. P [pianotant dans les très graves] Mais avec une voix, c’est un peu plus dur de faire ...C’est impossible de faire P [pianotant dans les très aigus] C’est impossible de faire. P [resserrant du geste un spectre sonore imaginaire] Donc avec la voix, on va réduire un peu mais i(l) y a quand même des notes euh, des notes medium, des notes graves, des notes medium et des notes aigües, ok ? P [à nouveau vers le piano] Ici avec la voix, on va faire la même vocalise qui s’appelle mgammam Élèves [en choeur] Mgammam P [en pianotant sur 5 touches] Juste medium, grave, medium, aigü, medium pour faire un son x Le premier son qu’on fait, c’est ça Medium, on descend, grave pour la voix, ça, medium, aigü, medium. On fait ça ?

Le moment permet aux élèves d’apprendre le lexique par la règle, la définition, mais aussi par l’exemple qui la met à l’épreuve. L’élève peut retenir selon la modalité qui lui convient le mieux. Le vocabulaire spécifique se dit et s’éprouve dans la pratique.

Une professeure d’Espagnol raconte : « Ce matin je travaillais en AP sur la méthodologie pour travailler un tableau en espagnol et j’avais (la consigne) “situar los elementos” et là un élève ne comprend pas “situar”, situer, en Français - on passe pas toujours par la traduction, mais là je l’ai fait. Situer, ça veut dire quoi ? Situer, c’est remettre à sa place. Il fallait faire des flèches avec des numéros. Et personne ne s’est moqué de lui. J’ai senti des élèves presque soulagés. Et ils sont quand même en 5ème et je ne pensais pas que ce mot “situer” allait présenter une difficulté. (...) Parfois les élèves peuvent se retrouver en échec parce que je n’ai pas su anticiper une difficulté sur un mot ». Il est vrai qu’en géographie, on situe lorsqu’on localise dans un espace plus vaste, alors qu’en famille, on situe en indiquant une position selon les liens de parenté. En Français “situer” un extrait dans l'oeuvre consiste à présenter les éléments antérieurs qui permettent de comprendre le passage tandis que “situer un auteur ou une oeuvre” vise à le positionner dans un contexte historique et/ou littéraire. La polysémie des mots ne polarise pas nécessairement l’attention du diplômé. Sans reformulation ni recueil des représentations des élèves sur un mot, il peut interdire la réalisation et a fortiori, la réflexion.

Dans la suite de la séance, les élèves découvrent et chantent une chanson de Henri Salvador, Mon ange gardien. Sur la photocopie distribuée, ils identifient une partition, des paroles, des couplets. La découverte du texte permet de clarifier des expressions (ange gardien), ou des termes polysémiques : saint, jurer. « Jurer, c’est promettre quelque chose au nom de Dieu, mais i(l) y a un autre- un autre sens aussi en français, jurer (…) c’est dire des jurons, et un juron, en fait c’est.un gros mot. Arrête de jurer, arrête de dire des gros mots ». On s’organise en chorale pour interpréter après audition, avec variations de rythmes, de tempo et des conseils dispensés au fil de l’eau. Il est question de chant a cappella et de play-back. La fin de la séance fait retour sur le vocabulaire spécifique.

La fin de la séance fait retour sur le vocabulaire spécifique : P [notes chantées] Quand on parle, on fait des phrases, en musique, on fait une… » Élèves mélodie P Une mélodie est bien claire, donne naissance à un morceau de musique qu’on peut retenir facilement c’est un… Élèves thème L’enseignant rappelle au piano le thème de la 5ème Symphonie de L. Van Beethoven, puis celui du générique des Simpson. Le professeur joue ensuite un morceau assez long et les élèves sont invités à lever la main lorsque ce thème apparaît. Le cours se termine après un vote à main levée sur le nombre de fois où le thème a été joué.

Domaines concernés du Socle* et compétences travaillées - Domaine 1 : les langages pour penser et communiquer (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant la langue française à l'oral et à l'écrit. (L’élève) utilise à bon escient les principales règles grammaticales et orthographiques. Il emploie à l'écrit comme à l'oral un vocabulaire juste et précis. (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant les langages des arts et du corps Sensibilisé aux démarches artistiques, l'élève apprend à s'exprimer et communiquer par les arts, de manière individuelle et collective, en concevant et réalisant des productions, visuelles, plastiques, sonores ou verbales notamment. (…) Il apprend ainsi le contrôle et la maîtrise de soi. - Domaine 2 : les méthodes et outils pour apprendre . Organisation du travail personnel L'élève (…) comprend le sens des consignes ; il sait qu'un même mot peut avoir des sens différents selon les disciplines. * Socle commun de connaissances, de compétences et de culture : extraits du texte concernant l’oral en annexe 5

Du langage pour raconter

Restituer des éléments d’une histoire entendue, répéter des phrases ou des formules

Produire un récit oral, s’appuyer sur un travail collaboratif entre élèves pour mettre au point un récit, vérifier sa compréhension

1

3

Raconter une histoire entendue ou lue, la mimer, la commenter, la transformer , jouer et manipuler

2

Restituer des éléments d’une histoire entendue, répéter des phrases ou des formules

Raconter des histoires est l’activité la plus fréquemment observée à l’école maternelle. Elle permet à des enfants de rencontrer le livre, d’apprendre des mots et des structures de phrases. Redire les histoires assure la mémorisation par la répétition si le récit est compris, ou mieux encore, partagé à la maison. Ainsi, le jeu théâtral permet d’intégrer des modèles lexicaux et syntaxiques, mais il ne permet pas toujours la compréhension.

À l'école maternelle, un atelier en Grande Section

  • Le contexte
  • Un extrait des échanges en classe
  • L'analyse de la séance

1

S3C

Dans une classe de Grande Section en REP+, une enseignante « se pose la question sur comment faire progresser les élèves en langage (sic), puisque dans la société d’aujourd’hui, on entend qu’il y a de plus en plus d’ateliers Éloquence, que l’oral est primordial. On a ce souci que les enfants parlent de mieux en mieux et soient plus à l’aise à l’oral ». Avec ses collègues, l’enseignante a suivi récemment une formation sur la méthode Narramus. Elle souhaite « apporter du lexique pour que les enfants se créent des images mentales et qu’ils puissent (…) raconter, un album par exemple », dit-elle. Le jour de l’observation, elle fait répéter une scénette extraite de l’album Les trois grains de riz [1]. [1] Agnès BERTRON-MARTIN & Virginie SANCHEZ, 2005, Les trois grains de riz, collection Les p'tits albums du Père Castor, Paris, Flammarion éditeur.

P [en modèle, scandant les mots] Petite Soeur Li, Petite Soeur Li Samy *tite Soeur Li, Petite Soeur Li, donne-moi du riz, du riz [intonation légèrement montante] avec du riz, j’efface les ennuis P C’est bien Samy. Deborah ! Deborah [qui se tortille avec sa fiche atelier à la main] Je te donne du- x poing de riz P Je te donne, je te donne, je te donne, je te donne ? E [à côté qui souffle] du Samy Une poignée de riz Deborah [se tortillant et agitant sa fiche devant sa bouche] Une poignée de riz P Je te donne une poignée de riz

D’une voix forte, la professeure déclame les phrases, vient en aide, insiste sur l’article et le genre qui pose problème : « Une ». Elle tient à transmettre un certain registre de langue : « avec plaisir » est plus « joli », dit-elle, que « ça me fait plaisir ». Mais, après une seconde d’étonnement, elle ne récuse pas la proposition de l’élève. Avec son groupe de « petits parleurs (avec) des difficultés syntaxiques », « l’objectif (est) double », faire dire et « d’abord s’approprier les structures de phrases (…) Là c’est simplifié. Avec un autre groupe, ça aurait été un peu plus loin dans la syntaxe, avec des phrases un peu plus compliquées », dit-elle. Le travail propose des « patrons » de parole. Mais il exerce la phonologie plus que la réflexion sur les mots. On passe sur le mot « poing » proposé par l’élève, pour insister sur une « poignée ». On pourrait faire remarquer que la poignée, c’est la quantité que contient le poing, quand le poignet permet de le faire tourner. Le défaut d’explicitation peut induire des erreurs de compréhension, ancrer des confusions sur les genres. Les interactions avec l’enseignante sont donc limitées quant au sens et ne sont pas visées entre les élèves. La compréhension est-elle assurée ?

Domaine concerné du Socle* et compétences travaillées - Domaine 1 : les langages pour penser et communiquer (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant la langue française à l'oral (…). (L’élève) emploie (…) à l'oral un vocabulaire juste et précis. * Socle commun de connaissances, de compétences et de culture : extraits du texte concernant l’oral en annexe 5

Raconter une histoire entendue ou lue, la mimer, la commenter, la transformer, jouer et manipuler

Selon nos observations, la compréhension semble mieux assurée quand les enfants disent en jouant avec des figures qui symbolisent des lieux ou personnages de l’histoire.

À l'école maternelle, en atelier en Petite Section : l'histoire de Boucles d'Or et les trois ours

  • Le contexte
  • Un extrait des échanges en classe
  • L'analyse de la séance

2

S3C

Dans une classe de Petite Section, sont affichés au fond de la classe les objectifs d’apprentissage, notamment à l’oral : en période 2, « J’apprends les premières règles de politesse : bonjour, merci, s’il te plaît » et en période 3 à « Raconter l’histoire des Trois Ours ». C’est l’objet de travail ce matin-là. Le récit s’appuiera sur la manipulation de figurines en cartons fabriquées par la maîtresse et disponibles au tableau. Elles représentent des lieux (la forêt, la maison), des meubles (les chaises à bascule), de la vaisselle (des bols) et bien sûr les personnages de l’histoire, les trois ours et Boucle d’or. En atelier, quatre élèves se distribuent les rôles. Un garçon se laisse convaincre de jouer le personnage de Boucles d’Or, puisque « là on fait semblant, on n’est pas obligé d’être une fille. On peut jouer le rôle de Boucles d’or », a dit la maîtresse. On se prépare à raconter face au tableau blanc.

N.B. Code couleur : passage remarquable commenté dans l'analyse de la séance. P [agenouillée, brandissant le livre face à une Aminata réjouie] P [tenant le livre ouvert à la première page] Alors, nous allons faire comme si nous faisions notre spectacle xxx Donc je commence ici. Vous vous rappelez comment commence l’histoire ? Aminata Oui P Il était Aminata Il était P =t=une fois Aminata [en sautant et marquant les phonèmes] =t=une fois P [montrant trois doigts levés et imitée par Bengali et Aminata] Trois ours. Aminata Trois ours. P [attirant Bengali vers elle] Il y avait Bengali Papa P [invitant Bengali à aller coller sa figurine au tableau] Ours, tu le mets ? Vas-y mets-le [Bengali colle la figurine de Papa Ours] Sajat Bébé P [en invitant Sajat à se diriger vers le tableau] Maman xx Maman [Sajat colle la figurine de Maman Ours] P [en ouvrant de la main gauche le livre de l’histoire (petit format) et en le montrant aux enfants, toujours debout à côté d’elle agenouillée] Maman Ours et Petit Ours Que se passe-t-il ensuite ? Aminata *** P Qui est Maman Ours ? C’est toi Sajat [qui a levé le doigt] P [levant l’index de la main droite et montrant le livre ouvert de la main gauche] Tu vois Sajat ? Un jour, Maman Ours Sajat [mimant une spatule qu’on fait tourner dans un bol imaginaire] *** P [reprenant le geste et imitée par Sajat] Oui c’est bien x Très bien Sajat ** Chocolat chaud P Elle prépare un- elle prépare un bol pour qui ? Sajat Bébé P [montrant au tableau le bol vert de Petit Ours] On commence par Bébé ? Très bien On commence par Bébé Bengali Bébé P [puis montrant le bol rouge] Ours Bengali Maman P [puis montrant le bol bleu] Ours et Bengali Papa P [puis répondant à Elimane qui attire l’attention] Papa Oui, c’est bien Elimane, c’est bien. Assieds-toi ! P [agenouillée et tournée vers Bengali, Aminata et Sajat, toujours debout face au tableau] Comment sont les chocolats ? Comment sont les chocolats chauds ? x Ils ont trop... Sajat Brûlants Aminata Brûlants P Ils sont brûlants, ils sont trop chauds [Aminata et Bengali agitent les mains comme s’ils s’étaient brûlés] Bengali Il va aller dans l’eau P [montrant les figurines au tableau] Non x Que décident, que décident Papa Ours, Maman Ours et Petit Ourson. Ils décident d’aller dans la Les élèves - forêt - forêt - forêt P [balayant de la main les représentations de la maison et les arbres qui l’entourent] Et c’est- Pourquoi ils vont aller se balader ? x Ils vont aller se promener dans la forêt pour laisser refroidir les chocolats. D’accord ? [Babillage des élèves devant le tableau] : *** P [à Bengali] Alors, tu prends Papa Ours, ils vont se balader dans la forêt [Bengali décolle sa figurine du tableau] P [tapotant le tableau à proximité des figures d’arbres] Allez, ils vont se promener là-bas [Bengali colle la figurine de Papa Ours près des arbres] P Très bien. Allez-y [Aminata colle la figurine de Bébé Ours près des arbres] P [regardant Sajat qui va coller sa figurine de Maman Ours] Et Maman Ours. Vas-y ! P [à Elimane qui s’est approché] Qui voilà ? Boucle d’or ? P [rejointe par les enfants. Tout le monde s’assied par terre] Allez, nous on s’assied, on reste ici et on regarde., allez on s’assied, asseyez-vous ! Et on regarde Boucles d’Or Venez avec moi, allez avec moi, par là, venez, venez, venez ! Alors, qui arrive tout à coup ? Elimane Boucles d’Or P Que fait-elle ? [Elimane est le seul qui soit debout, face au tableau. De la main gauche, il tient le portrait de Boucles d’Or par lequel il s’identifie à elle. De la main droite, il balaie du revers de la main les bols des ours.] P Elimane, Elimane, tu vas trop vite ! On n’entend rien, on comprend rien. Recommence et parle doucement xx Alors on y va ! Boucles d’Or regarde par la fenêtre. Que voit-elle ? Elimane [face à la représentation de la maison des ours] Trois bols P Trois bols ! Un bol Elimane [qui frappe du revers de la main les images des trois bols] de Papa Ours, Maman Ours et Bébé Ours P Très bien. Et donc, que fait-elle ? Elimane Elle *** Papa Ours. P Elle Elimane [qui mime] boit P Comment est-il ? Comment est-il le bol de Papa Ours ? Autres enfants Trop chaud P Il est trop chaud. Ensuite ? Elimane [qui fait semblant de boire dans le bol figurine rouge] Le bol de Maman Ours. Il est froid P Il est froid Elimane [qui fait semblant de boire dans le bol figurine verte] Et le bol de Bébé Ours P Comment est-il ? Elimane [en agitant les bras] Il est parfait P Parfait Sajat ou Aminata Parfait P Il n’y en a plus. On en est là. Ensuite, que se passe-t-il ? Elimane *** P Elle a envie d’aller se Elimane [fin pas très bien articulée] balader une chaise à bascule P Elle va se- elle va s’installer sur les chaises à bascule. Donc elle va sur la chaise de ? Elimane [évoquant les figurines] Papa Ours. Mais sont où ? Mais sont où les sièges ? P Devant toi, regarde ! Elimane [qui pose la main sur la figurine qu’il désigne] I(l) y a le siège de Papa Ours P Tout à fait. On y va. P [se rattrapant car c’était une erreur] Ti installe Petit Ours Tu installes Boucles d’Or, s’il te plaît. Allez, vas-y ! [Elimane pose le portrait de Boucles d’Or sur la chaise à bascule de Papa Ours, mais les figurines se décollent du tableau blanc.] P [à Aminata] Attends, attends, on va faire le siège qui- Aminata Yeh P à Aminata *** Aminata Oui P [à Elimane puis voyant que Elimane réussit tout seul] Tu t’en sors ? Laisse-moi un tout p(e)tit peu d- Est-ce que tu as besoin d’aide ? Non bien sûr que non [Rires]. Alors on y va x Donc comment est le siège à bascule, le siège à bascule de Papa Ours ? Aminata Il est trop dur P Non. Il va trop Aminata Vite P [qui voit que les figurines dont on parle se décollent du tableau] [à Elimane, geste à l’appui] Balancez-vous j(e) vais aider Elimane ! Balancez-vous, balancez-vous Regarde, on va mettre comme ça ! Un peu plus tard, une petite fille, seule, sera invitée à redire l’histoire « Elle goûte le bol de Papa Ours. Il est trop chaud. Maman ours, il est trop froid. ** Petit Ours, il est parfait. Elle le boit tout ». « Elle le boit tout entier », corrige l’enseignante, geste à l’appui.

Avec son petit groupe, l'enseignante a fait d’abord répéter. Elle suggère par des phrases à trous, complétées par les élèves qui se rappellent « brûlants » par exemple. Puis elle redéfinit pour assurer la compréhension : « Ils sont brûlants, ils sont trop chauds ». Ce début vaut pour échauffement et rappel de mémoire. La professeure peut ensuite inviter à une parole plus autonome par des questions ouvertes : « Que se passe-t-il ensuite ? » « Que fait-elle ? » « Que voit-elle ? » « Comment est-il ? », « Ensuite ? ». Les élèves répondent surtout par des mots que l’enseignante complète en phrases, mais quelques-unes sont bientôt dites par les écoliers eux-mêmes : « I(l) y a le siège de Papa Ours », « Il est trop dur ». Une fillette tourne une spatule dans un bol imaginaire pour signifier la préparation du chocolat : c’est par le mime que des moments de l’histoire reviennent. Leur succession s’appuie sur les figurines, reconnues et déplacées en suivant le fil du récit. Elles suscitent une mise en images mentales sous-titrées par des mots acquis. Ils permettent de dire, en manifestant la compréhension. En sens inverse, l’opération préfigure la lecture : plus tard, au CP, on construira un nouveau film, à partir des mots et des phrases. En attendant, l’enseignante remise ses accessoires dans une boîte à histoires mise à la disposition des maîtresses de Moyenne et Grande Sections. Mais la transmission vers le CP est plus difficile. Des enseignants réalisent donc de petits albums ou accessoires à destination des familles. L’initiative est chronophage, épuisante, mais des histoires pourront être rejouées à la maison, voire passer d’un enfant à l’autre.

Domaine concerné du Socle* et compétences travaillées - Domaine 1 : les langages pour penser et communiquer (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant la langue française à l'oral (…). (L’élève) emploie (…) à l'oral un vocabulaire juste et précis. (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant les langages des arts et du corps Sensibilisé aux démarches artistiques, l'élève apprend à s'exprimer et communiquer par les arts, de manière individuelle et collective, en concevant et réalisant des productions, visuelles, plastiques, sonores ou verbales notamment. (…) Il apprend ainsi le contrôle et la maîtrise de soi. * Socle commun de connaissances, de compétences et de culture : extraits du texte concernant l’oral en annexe 5

Produire un récit oral, s’appuyer sur un travail collaboratif entre élèves pour mettre au point un récit, vérifier sa compréhension

Afin que les élèves réussissent à raconter un histoire, une modalité de travail s'est avérée plus profitable que d'autres. Le travail sur albums codés en coopération a montré des résultats saisissants, lorsque les enfants peuvent développer à la fois l’écoute et le conseil.

À l'école élémentaire, dans une classe de CP : raconter Le Petit Chaperon rouge

  • Le contexte
  • Se préparer à raconter l'histoire
  • L'analyse du moment de répétition
  • La prestation finale devant la classe
  • Bilan

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S3C

Dans une classe de CP dédoublé en REP conduite par deux enseignantes, les élèves travaillent en groupes sur le récit, selon une démarche collaborative instaurée depuis le début de l’année. L’objectif est d’amener les élèves à raconter chacun à tour de rôle une partie d’un conte, Le Chat botté, Boucles d’or et les trois ours et Le Petit Chaperon rouge. Les supports sont des albums sans texte où les illustrations traditionnelles ont été remplacées par un codage à base de formes géométriques. On travaille une double page après l’autre. Chaque page tournée est l’occasion pour l’enseignante, puis par élèves, de traduire le code : le rond noir symbolise le loup, le point rouge, le Petit chaperon rouge, le point bleu, la grand-mère, etc... Les élèves doivent d’abord négocier afin de se répartir les passages à raconter. À chacun, l’enseignante montre la page suivante pour que l’élève sache où arrêter sa narration. L’entraide est la règle, pour améliorer la prestation orale. Chacun devra proposer une remarque positive et un conseil au conteur, à chacun donc, à tour de rôle. C’est le groupe du Petit Chaperon rouge que nous avons particulièrement observé.

N.B. Code couleur : passage remarquable commenté dans l'analyse de la séance. P On commence, Marc Erone ? Marc Erone Il était une fois xx une petite fille qui s’appelait le Petit Chaperon Rouge. Un jour, sa maman lui dit Va apporter une- un petit pot de beurre et une galette xx Va jusqu’x- jusqu’au bout de la forêt x jusqu’au bout de la forêt x et xx dis pas bonjour aux inconnus x que tu connais pas x et x traîne pas dans les chemins. P D’accord. Tu as fini ? Vous avez des choses à dire à Marc Erone ? E (fille) Il a bien fait mais il parle trop vite. P Tu trouves qu’il parle trop vite, d’accord, très bien. Doria ? Doria Moi j- x ** i-il a parlé comme un robot P Comme un robot ? Tu as trouvé qu’il.parlait.un.peu.comme.ça ? C’est ça ? Je pense que c’est à des moments, il était en train de réfléchir à la suite de sa phrase. Par contre, est-ce que Marc Erone n’aurait pas oublié un élément de notre histoire ? E à voix très basse Si E à voix très basse Hum si E [le même que précédemment ?] Et /ta, la/ grand-mère qui est malade Autre E Ah oui P T(u) as oublié de dire que Le Petit Chaperon Rouge allait voir sa grand-mère Marc Erone Ah oui P Tu veux bien recommencer ? Marc Erone Il était une fois P Parle bien fort Marc Erone [qui effectivement parle bien plus fort] Il était une fois une petite fille qui s’appelait le Petit Chaperon Rouge. Un jour sa maman lui dit Grand-mère est malade. Va tout au bout du chemin x Va l’apporter un petit pot de beurre et xx et une galette xx Va tout- (au) bout xx Autre E Et ne t’écarte pas du chemin Marc Erone Et ter- et ter-x P Tu veux bien répéter ? Marc Erone Et t’écar- P Ne Marc Erone Et écar- écar- écarte pas du chemin P Ne t’écarte pas du chemin Marc Erone Ne t’écarte pas du chemin P Et x ne... Marc Erone Ne traîne pas E fille Non. Et ne parle pas aux inconnus P Et ne parle pas aux inconnus Marc Erone Et ne parle pas aux inconnus P Et donc, on va s'arrêter là. Attention ** tu as dit la Maman l’a dit, ou je sais pas quoi, c’est la maman lui dit. La maman du Petit Chaperon Rouge lui dit. [ ## puis c’est au tour de Doria de raconter] Doria Le petit Chaperon rouge xx <...> Où vas-tu avec ce panier ? Je vais chez ma grand-mère qui est- qui est malade . J’apporte un petit pot de beurre et c-cette galette. Et où habite ta grand-mère ? dit le Loup. De l’autre côté de la forêt, Grand Loup en lui montr- ant le chemin. P Super E [qui ?] Bravo P C’est chouette, chouette E [qui ?] J(e) croyais qu’elle allait oublier P C’est chouette ! Tu as quelque chose à dire, Laura ## P Qu’est-ce que vous pourriez donner- non- qu'est-ce que vous pourriez donner comme conseils à Doria x conseils ou alors des critiques positives ? Qu’est-ce que vous pourriez dire à Doria ? Marc Erone Moi, je pense qu’elle doit- elle doit soulever un peu sa voix P Soulever ? On dit élever Marc Erone Élever P Élever le volume de sa voix Marc Erone Un p(e)tit peu ça oui. P Vous êtes d’accord avec Marc Erone ? Élèves /// *** Doria En fait° P Attends, avant de donner ton idée, est-ce que vous êtes d’accord avec Marc Erone xx sur le fait que Doria elle monte un p(e)tit peu le volume de sa voix ? Élèves /// P Moi, j(e) suis d’accord, c’est vrai parce que moi j(e) t’entends parce que je suis juste à côté. Je ne suis pas certaine que Hawa ait tout entendu. D’accord ? Donc il va falloir que tu parles un p(e)tit peu plus fort. De plus i(l) y a quelque chose que Doria a très bien fait… oui ? E fille J’aime bien sa façon de faire des voix pa(r)ce que elle a fait une voix grave pour le Loup et- P [avec une voix grave] Elle a fait une voix grave pour le Loup E fille Et une voix haut perchée pour le Petit Chaperon rouge P [avec une voix aigüe] Et une voix haut perchée pour le Petit Chaperon rouge. On garde ça ? Plusieurs élèves - Oui - Oui P [adoptant une voix grave en même temps qu’elle en parle] Donc c(e) qui pourrait être bien dans la suite de votre récit, peut-être que quand c’est le Loup qui parle, ça pourrait être une bonne idée que vous gardiez la voix grave pour le Loup et la voix haut perchée - Qu’en pensez-vous ? ## [Après un échange avec Hawa et Adama sur la suite de l’histoire selon les images codées, c’est au tour de Mélina de raconter] Mélina Le Loup avait des *** dans la tête. Il s’approcha de la maison de la grand-mère et tourna. Grand-mère, c’est moi ton Petit Chaperon rouge. La grand-mère dit Tire la chevillette, la bobin- xx cherra. Tire la bobinette et xx chevillette cherra xx et il est rentré xx et vite il a mangé E [Adama et autres élèves] - Il la dévore - Il la dévore - Et entra dans la maison Adama ou Marc Erone ? (El)l(e)a oublié un truc P Oui Adama et/ou Marc Erone ? - Elle a- Hawa - Et moi ? P C’est bien Mélina E Elle a oublié de dire d’ouvrir la porte. P Et oui. Tire- il tira la bobinette, et tu peux dire : Et la porte s’ouvrit, par exemple. C’est ça c’est c(e) que tu avais dit hier. D’accord ? Hawa, tu sais, c’est pas parce que toi tu n’es pas en train de raconter l’histoire que tu n’as pas le droit de donner tes idées à tes camarades pour les aider à s’améliorer, les conseils. D’accord Hawa ? xx Alors… Euh On en arrive- D’autres conseils pour Mélina, pour qu’elle puisse améliorer ? Doria Je crois qu’elle- elle pourrait un peu articuler mieux P Articuler mieux ? D’accord. D’accord. Doria te conseille d’articuler un petit peu mieux. Moi j’ai trouvé que ça allait. Je pense simplement- Oui ? Doria En fait, il faut qu’elle parle un peu plus fort P Voilà, c’est ce que je pensais aussi. Que tu parles plus fort, c’est le même conseil que pour Doria. Il faut que vous pensiez à élever le niveau de vos voix pour pouvoir capter l’attention x de vos auditeurs x de ceux qui vont vous écouter. D’accord ? Ensuite c’était à Soujoud, je crois. ## Soujoud Une fois le Petit Chaperon rouge arrivé, il frappa à la porte et il dit, il dit à la Grand-mère : C’est moi ton Petit Chaperon rouge. La grand-mère lui réponda et après le Petit Chaperon rouge entra elle était sur le lit parce que le Loup, le Loup é-é- elle lui disait *** P Je t’arrête, tu devais faire juste cette image, d’accord ? Soujoud Oui P Donc là, juste avant que le Petit Chaperon rouge entre. Qu’est-ce que vous pouvez conseiller à Soujoud ? E Euh Autre E enthousiaste C’était très bien ! P C’était très bien, super E Mais elle a dit Grand-mère P Elle a dit Grand-mère et oui, et où est la grand-mère ? E G Bah, elle est dans l’estomac du Loup ! P Donc est-ce que c’est la grand mère qui répond E G Non P Qui répond au Petit Chaperon rouge ? EG Non, mais le Petit Chaperon rouge, il croit que c’est la grand-mère P Oui, le Petit Chaperon rouge croit que c’est la grand-mère donc quelle formule utilise la grand-mère pour faire entrer le Loup lui dire dans la maison, vous vous souvenez ? Plusieurs élèves - Oui - Oui P Hawa ? Hawa Tire la bobinette et la chevillette, Cherra P Je crois que c’est tire la chevillette et la bobinette, P et autres élèves en choeur - Cherra - Cherra - Cherra P D’accord. Et le Petit Chaperon rouge est habitué à ce que sa grand-mère lui dise ça E Hum P Vous (ne) trouvez pas que ce serait étrange si le Petit Chaperon rouge arrive à la maison, demande à entrer à la maison et que la grand-mère ne dit pas la formule habituelle ? E Ah non P Donc, ce s(e)rait un p(e)tit peu étrange, donc il faut bien que tu penses, Soujoud, à dire cette formule pour entrer dans la maison E [garçon : G] Magique ! P Tire la chevillette et la bobinette, Cherra. D’accord ? E [fille : F] Maintenant, c’est à qui ? ## [Hawa raconte le dialogue entre le loup et Le Petit Chaperon rouge. Elle a oublié quelques éléments que les camarades lui ont soufflés mais parvient à terminer son récit avant des conseils de ses camarades.] E F Quand elle dit que vous avez de grands yeux, Elle a dit c’est pour mieux t’entendre mon enfant E G C’est juste assez- P Oui, vas-y, Adama ? Dis à Hawa c(e) que tu, c(e) que tu- les yeux ça sert à Adama Les yeux, ça sert à voir P Et pas à entendre, donc faudra que tu fasses attention, comme vous aviez des grands yeux, c’est pour mieux te… Plusieurs élèves - Voir - voir P Que vous avez de grandes oreilles… On retravaille sur le conseil de Mélina et d’Adama : Que vous avez de grandes oreilles, c’est pour mieux ... Hawa et autre élèves - T’entendre - T’entendre P T’entendre et enfin les grandes dents Adama C’est pour mieux te manger ! P C’est pour mieux te x manger. Est-ce que vous avez d’autres conseils ? ## Doria J’aurais aimé que tu- tu as bien récité mais j’aurais aimé que tu fais la voix grave et la voix haut perchée. P Elle aurait aimé que tu fasses les voix grave et haut perchée. On avait dit que le Loup, il parle avec une voix Plusieurs 2lèves - Grave - Grave Autre élève [avec une voix suraiguë] Et le petit Chaperon rouge a une voix P [puis en chuchotant] Donc n’hésite pas à transformer ta voix à ce moment. On va aller rejoindre les autres groupes ? Essayez de garder la surprise...

Le cadre studieux et bienveillant permet aux élèves d’apprendre dans un espace de parole plus vaste que celui le plus fréquemment observé. L’apprentissage s’approfondit dès lors que les camarades peuvent être corrigés, parfois à l’invite de l’enseignante - le premier a oublié de parler de la maladie de la grand-mère - parfois plus spontanément : « Elle a oublié de dire d’ouvrir la porte » ; « Quand elle dit que vous avez de grands yeux (…) Elle a dit c’est pour mieux t’entendre mon enfant ». Or « les yeux, ça sert à voir ». Les élèves s’attachent donc à la cohérence logique du récit et du lexique. L’un d’eux a même acquis la « théorie de l’esprit » en adoptant le point de vue du petit chaperon rouge qui « croit que (le loup) c’est la grand-mère. » Les écoliers se montrent aussi attachés à la qualité de l’interprétation du texte qu’il faudra « articuler » « dire un peu plus fort » avec « la voix grave et la voix haut perchée », selon les personnages. La modulation permet de mieux comprendre et d’être compris par ceux qui seront à l’écoute. Le moment témoigne de la soif d’apprendre et de réutiliser. Ainsi, les élèves semblent apprécier les expressions rares ou désuètes : « haut perché » est proposé par une écolière au début, répétée à la fin. « Tire la chevillette et la bobinette, Cherra » semble un code ravissant. Certes, s’essayer est risqué : « La grand-mère lui réponda ». L’élève qui commet l’erreur conjugue un verbe du 3ème comme un verbe du premier groupe, mais il montre aussi qu’il a intégré la forme du passé simple, voire son utilité dramatique. Pour le reste, les fautes de grammaire sont corrigées en toute bienveillance par l’enseignante - « lui » plutôt que « le », « fasses » et non pas « fais ». Ces remarques vaudraient aussi pour l’écrit. Mais il en est une qui évoque une spécificité de l’oral : on pense à la suite en même temps qu’on parle. « Tu as trouvé qu’il.parlait.un.peu.comme.ça ? C’est ça ? je pense que c’est à des moments, il était en train de réfléchir à la suite de sa phrase », dit la maîtresse. Elle n’explicite pas davantage mais fait entendre là une des difficultés de l’oral. La souligner témoigne de la confiance accordée aux élèves.

Le récit des élèves permet l’explicitation des pages codées pour ceux qui n’ont pas étudié le même conte. Les prestations témoignent de la compréhension de l’histoire, mais aussi des bénéfices tirés de la correction collaborative. Cette fois, Marc-Erone n’a pas oublié d’évoquer la grand-mère malade, il a prononcé correctement « Ne t’écarte pas du chemin ». Le ton est correctement mis par tous. La porte s’ouvre, la chevillette et la bobinette ont été tirées dans le bon ordre. Le récit, cohérent, a été raconté avec fluidité. Certes les passés simples des verbes des deuxième et troisième groupes, ainsi que le participe présent font toujours problème. Mais ils ne sont pas encore attendus à ce niveau scolaire.

La séance parfaitement rythmée a permis l’observation des prestations finales devant la classe. Un kamishibaï a permis de faire défiler les doubles pages des albums codés. P Personne ne connaît les planches sauf ceux qui les ont travaillées, donc on découvre, d’accord, et on a le droit de penser tout c(e) qu’on veut dans sa tête xx et on ne doit pas interrompre l’histoire des copains # [Petits bruits et chuchotements de mise en place] Marc Erone Il était une fois une petite fille qui s’appelait Le Petit Chaperon rouge et un jour sa maman lui dit xx Va apporter un petit pot de beurre x et une galette, Grand-mère est malade xx Va tout au fond de la forêt xx de l’autre côté de la forêt x et t’écarte pas- ne t'écarte pas du chemin xx et parle pas aux inconnus xx Adama Le Petit Chaperon rouge alla dans la forêt et elle vit un loup. Le Loup le répond : Bonjour petite fille, où vas-tu d’un si bon pas ? Je vais rendre visite à ma grand-mère qui est malade xx Et où habite ta grand-mère ? P [tout bas] Merci Adama Adama Au bout du village P [discrètement] C’est au tour de Doria. Merci, Adama. C’est au tour de Doria. Adama [en repartant à sa place] Et le Petit Chaperon rouge montre- montra du doigt P Merci, Adama. C’est au tour de Doria. [Chuchotements pendant le changement de conteur] Doria Le Petit Chaperon rouge rencontra le Loup. Le Loup lui disa (sic) Bonjour Petite fille, où vas-tu avec ce panier ? E Ouah ! Doria [qui met très bien le ton et isole bien les dialogues] Lui répond le Loup. Je vais chez ma Grand-mère lui rapporter ce petit pot de beurre et cette galette, dit le Petit Chaperon rouge. Et où habite ta grand-mère ? De l’autre côté de la forêt en montrant x le x chemin, dit le Petit Chaperon rouge. Je vois x et et x tu pourrais lui faire encore plus plaisir en lui fais- en lui f- fera un bouquet de fleurs. Très bonne idée, merci, Monsieur le Loup ! en a a- avec une idée derrière la tête. E [dans le public] Ahan… Ouloulou ! Petits bruits divers E [dans le public] J(e) suis pas d’accord avec le Loup] Mélina Grand-mère, c’est moi, ton petit Chaperon rouge, dit le Loup. La grand-mère dit Tire la chevillette et la bobinette, cherra. Le Loup tira la bobinette et la porte s’ouvrit, s’ouvra. Puis /it,vite/ il a mangé la grand-mère. [Bruit de feuille dans le kamishibaï] Soujoud Enfin arrivé, le Petit Chaperon rouge et f- frappa à la porte et et le Loup lui dit, lui réponda Tire la chev- la chevillette et la bobinette, cherra. La- le Petit Chaperon rouge tira la bobinette x et entra dans la maison Hawa Et et et le Petit Chaperon rouge dit à le Loup Mais que vous avez de grand(e)s oreilles ! C’est pour mieux t’entendre mon enfant. Que vous avez de grands yeux ! C’est pour mieux t- te voir, mon enfant. Que vous avez de de grand(e)s dents. C’est pour mieux te manger et le Loup mangea d’un seul coup l- le Petit Chaperon rouge. Et le Petit Chaperon rouge x et la g- grand-mère se trouva eux deux dans le ventre du Loup. P Bravo [Applaudissements et chuchotements. Suit un court débriefing avant le départ pour la cantine].

Domaines concernés du Socle* et compétences travaillées - Domaine 1 : les langages pour penser et communiquer (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant la langue française à l'oral (…). L'élève parle, communique, argumente à l'oral de façon claire et organisée ; il adapte son niveau de langue et son discours à la situation, il écoute et prend en compte ses interlocuteurs. (…) Il utilise à bon escient les principales règles grammaticales et orthographiques.Il emploie à l'écrit comme à l'oral un vocabulaire juste et précis. (…) Il apprend que la langue française a des origines diverses et qu'elle est toujours en évolution. (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant les langages des arts et du corps Sensibilisé aux démarches artistiques, l'élève apprend à s'exprimer et communiquer par les arts, de manière individuelle et collective, en concevant et réalisant des productions, visuelles, plastiques, sonores ou verbales notamment. (…) Il apprend ainsi le contrôle et la maîtrise de soi. - Domaine 2 : les méthodes et outils pour apprendre (L’élève) doit savoir (…) prendre la parole, travailler à un projet, s'entraîner en choisissant les démarches adaptées aux objectifs d'apprentissage préalablement explicités. (…) La maîtrise des méthodes et outils pour apprendre développe l'autonomie et les capacités d'initiative ; elle favorise l'implication dans le travail commun, l'entraide et la coopération. . Organisation du travail personnel L'élève (…) gère les étapes d'une production, écrite ou non, mémorise ce qui doit l'être. Il comprend le sens des consignes (…). . Coopération et réalisation de projets L'élève travaille en équipe, partage des tâches, s'engage dans un dialogue constructif (…). Il apprend à gérer un projet (…) L'élève sait que la classe, l'école, l'établissement sont des lieux de collaboration, d'entraide et de mutualisation des savoirs. Il aide celui qui ne sait pas comme il apprend des autres. (…) - Domaine 3 : la formation de la personne et du citoyen (…) L'élève comprend et respecte les règles communes, notamment les règles de civilité, au sein de la classe (…). * Socle commun de connaissances, de compétences et de culture : extraits du texte concernant l’oral en annexe 5

De la mise en voix à l’éloquence : apprendre pour l’oral

Réciter par cœur une comptine (en Maternelle), un poème

Travailler l’oral par la création personnelle, se familiariser avec les ressources de l’éloquence, connaître la signification des gestes, des distances, des postures

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Mettre en voix un texte, l’interpréter oralement en utilisant les ressources de la voix et des gestes

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Réciter par cœur une comptine (en Maternelle), un poème

La récitation reste un exercice traditionnel à l’école, mais elle ne vise plus guère des leçons : « Le par cœur mettrait en difficultés beaucoup d’élèves », dit une Principale. Pourtant, des enfants continuent encore à le faire à la maison. Ils récitent à leurs parents qui parfois l’exigent ou, plus tard, ils préparent un oral d’examen, oral de stage ou autre oral du DNB. En classe, on récite plutôt des comptines, puis des poésies, à l’école élémentaire et parfois encore en collège. Le moment d’exposition devant la classe continue d’inquiéter les élèves. On craint de se tromper, de s’exposer aux moqueries, de se décevoir. Un seul de ces moments de récitation a été observé au collège. La séance témoigne d’une ordinaire difficulté de l’enseignant en éducation prioritaire : s’adapter à des élèves qui n’ont pas assez appris en amont, faute d’aide avisée ou de bonnes méthodes de travail à la maison. Comment faire ?

Au collège, en 4ème, comment apprendre un poème pour le réciter ?

  • Le contexte
  • L'analyse de la séance

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Le poème à réciter est Demain dès l’aube… de Victor Hugo. Mais le collégien appelé au tableau ne sait que deux vers, assez mal dits. Rares sont les élèves à avoir appris davantage et proposé des critiques constructives sur l’interprétation du texte. Le dialogue entre l’enseignante et ses collégiens se concentre donc sur la correction de la posture : se tenir droit, ne pas mettre les mains dans les poches, ne pas s’arrêter même si on s’est trompé. Les conseils sont notés au tableau puis le titre de la leçon « Comment réciter un poème ? » avec la mention « méthodologie » en marge.

Dans une classe de dix-huit collégiens présents, les élèves qui connaissent déjà le texte par coeur sont invités à expliquer comment ils ont procédé. L’une parmi eux passe par You Tube où sont proposées des mises en musique de poèmes célèbres. Elle enregistre la bande et la passe en boucle pendant deux heures : « Je chante (aussi) mes leçons », dit-elle. Au fur et à mesure des suggestions, l’enseignante les note au tableau sous forme de liste : (pour) Apprendre par cœur le poème. - Passer la chanson sur You Tube : plusieurs versions chantées du poème. - Lire chaque strophe plusieurs fois à voix haute « vers par vers plutôt que strophe par strophe, pour ne pas trop “charger” la mémoire d’une traite », a ajouté l’enseignante à l’oral après qu’une élève a parlé de mémoire auditive. - Recopier le poème en jouant sur la couleur, la disposition des vers pour mobiliser la « mémoire visuelle ». À entendre les élèves, ils apprennent plutôt par cœur et debout. L’envie de marcher pour apprendre est habituel, selon l’enseignante qui conseille alors de parcourir l’appartement en associant une pièce à un passage du texte : « au 3ème vers, j’arrive au salon », dit-elle pour exemple. Les élèves qui savent déjà très bien dire le poème (trois filles, un garçon) sont invités à le réciter, l’une seule, les deux autres en alternance, d’un vers à l’autre, puis, le garçon, à toute vitesse. Le texte est désormais connu mais sa compréhension, compromise. La demi-heure suivante est consacrée au travail sur le poème. Les onze élèves qui ne le savent pas encore bien sont invités à l’apprendre, debout, et en binôme, chacun se faisant récitant ou correcteur, à son tour. D’un essai à l’autre et en fonction des conseils du camarade, la mémorisation progresse rapidement. Les sept autres élèves vont travailler dans le hall, devant la classe pour apprendre avec l’enseignante à améliorer l’adresse et jouer des intonations. Un élève du premier groupe rejoindra cet ensemble dès qu’il aura assez mémorisé. Une autre séance doit poursuivre le travail le surlendemain. Compte tenu du temps imparti, peut-être pouvait-on sérier les difficultés : mémoriser, avec un temps d’exercice, travailler sur le dire, texte en main, puis conseiller des postures.

Domaines concernés du Socle* et compétences travaillées - Domaine 1 : les langages pour penser et communiquer (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant la langue française à l'oral (…). . Comprendre, s'exprimer en utilisant les langages des arts et du corps Sensibilisé aux démarches artistiques, l'élève apprend à s'exprimer et communiquer par les arts, de manière individuelle et collective (…) Il apprend ainsi le contrôle et la maîtrise de soi. - Domaine 2 : les méthodes et outils pour apprendre (...) . Organisation du travail personnel L'élève se projette dans le temps, anticipe, planifie ses tâches. Il gère les étapes d'une production, écrite ou non, mémorise ce qui doit l'être. Il comprend le sens des consignes (…). * Socle commun de connaissances, de compétences et de culture : extraits du texte concernant l’oral en annexe 5

Mettre en voix un texte, l’interpréter oralement en utilisant les ressources de la voix et des gestes

Des options ou ateliers « Éloquence » ont vu le jour en éducation prioritaire. Sur les trois observés, l'un ne proposait, en première séance que des échauffements vocaux, Les deux autres étaient consacrés à l’oralisation de discours écrits. Comment a-t-on procédé ?

1. La mise en voix du discours de Greta THURNBERG à l'ONU par des élèves de 4ème et 3ème

2. L'oralisation de textes écrits par les élèves eux-mêmes

  • Le contexte
  • Le discours à coder
  • L'analyse de la séance

  • Le contexte
  • Un des textes mis en voix
  • L'analyse de la séance.
  • Bilan

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Greta THURNBERG est présentée et son discours distribué sur papier. Déjà travaillée lors d’une séance à la médiathèque, une signalétique au tableau est proposée afin de coder le texte qui sera ensuite oralisé. Chaque élève n’a qu’une phrase à traiter pour la lecture à suivre. Pendant les cinq dernières minutes, le discours est lu en continu. Il reste peu de temps pour un retour sur l’expérience. Au total, les élèves se seront exprimés chacun moins de trois minutes.

Dans ce réseau (REP+), une option Éloquence, d’abord proposée dans le cadre du Parcours Excellence est désormais ouverte à tous les élèves de 3ème volontaires. Elle mobilise deux professeurs de Lettres pour vingt séances de deux heures hebdomadaires. Vingt élèves sont inscrits, essentiellement des filles. Nous avons assisté à leur deuxième réunion, commencée là encore par un échauffement vocal en deux temps. Le premier est consacré au langage non verbal et répond à la consigne de l’enseignante : « L’idée : j’ai une boîte. Je vais la passer à la personne suivante. Elle va l’ouvrir et selon ce qu’i(l) y a dedans, c’est à elle de nous expliquer [sic : montrer] quelle émotion elle ressent, ce qu’elle a pu trouver dans la boîte, évidemment sans parler ». L’intérêt de l’exercice n’est pas explicité pour une future situation de communication. Le second exercice est consacré au langage verbal. Le premier de la ronde commence une histoire par une phrase. L’enseignante introduit alors un adverbe, « heureusement » ou « malheureusement », qui oriente la proposition de l’élève suivant, dans la logique du thème initial. Trois histoires, plutôt enfantines, sont ainsi élaborées. Transférable à d’autres prestations orales, l’intérêt de ce moment n’est pas non plus explicité. Pendant les trente minutes suivantes, deux textes, rédigés par deux élèves sont oralisés.

« On dit souvent que la vérité sort de la bouche des enfants. La vérité, mais qu’est-ce que la vérité ? La vérité est c(e) qui est en accord parfait avec la réalité. Mais faut-il toujours la dire ? x Pour ma part, non. x Toute vérité est bonne à savoir, certes, mais pas toujours bonne à dire. Bien évidemment, la vérité, c’est très important pour garder la confiance des gens qui nous entourent. Mais il faut perpétuellement mesurer les conséquences et on ne peut pas me permettre [sic] de dire une vérité à quelqu’un tout en sachant que cette vérité pourrait lui donner des envies meurtrières ou suicidaires ou bien d’autres.encore. On va prendre un exemple, euh, quelqu’un peut me donner trois noms au hasard ? Victor, Victor, Marco, Sofiane. Alors, on va prendre par exemple Victor, Marco et Sofiane sont trois amis, de grands amis et un jour, Victor et Sofiane se disputent, une dispute, très très grave, au point où ils s’arrachent les cheveux. x Sofiane, c’est ça (?) essaie de les séparer. Victor va de son côté, et euh, Marco va de l’autre. Euh, sauf que x S- Sofiane qui est au milieu des deux essaie de les réconcilier mais ça n(e) march(e) pas. Marco va demander à Sofiane où est Victor. x Sofiane sait que s’il lui dit, où il est, il est capable de lui casser les dents de- ou d’autres choses encore. Donc est-ce qu’il doit dire la vérité à son ami ou pas ? Pour moi, il est préférable de dire “Je ne sais pas”. “Je ne sais pas”, vous ? . [adresse au public] Tu dirais quoi ? Je ne sais pas. Et toi, tu dirais quoi ? Alissa ? On dirait tous “Je ne sais pas”. Est-ce que quelqu’un dirait autre chose ? xx Je ne dirais pas. Je m(e) dirais-, je réfléchis, quand on pense, faut réfléchir et surtout Pose-toi deux minutes. Et est-ce que tu lui dirais où est son ami en ce moment ? Non. Oh oui, d’accord, c’est pour ça que pour moi on n’est pas toujours obligé de dire la vérité. Comme {Jan-kélévitch}[1] l’a dit - je suis sûre que vous ne le connaissez pas « Toute vérité n’est pas bonne à dire, on ne répond pas à toutes les questions, du moins, on ne dit pas n’importe quoi à n’importe qui. Il y a des vérités qu’il faut manier avec une précaution infinie ». Et une dernière citation de Voltaire - j’imagine que vous connaissez tous cette fois - « la vérité est un fruit qui ne peut être cueilli que s’il est tout à fait mûr ». Et c’est fini. » [1] L’élève a prononcé Jean Kélévitch, le patronyme de Vladimir Jankélévitch, d’où la transcription ci-dessus.

À la fin de la prestation, le minuteur affiche 2:57. L’enseignante remarque l’adresse directe au public, astucieuse, et qui a permis, selon elle, de gagner du temps. La performance est donc réévaluée à 2:30. L’oratrice s’est montrée « très à l’aise », selon ses camarades, qui n’ajoutent aucun autre élément critique. L’échange porte donc sur des questions techniques. Pour éviter de trop regarder son texte, une élève conseille d’ « écrire très gros » et « avec des couleurs », ajoute la professeure. « En termes de force de la voix, c’est pas très fort », dit-elle et seulement envisageable devant un public « très sage » et peu nombreux. L’enseignante choisit alors de traiter du fond, de distinguer « la thèse qu’elle a défendue » autrement dit « son opinion », dit-elle, et des éléments à l’appui, « des arguments », dit une élève. Le texte est réécouté pour rechercher celle-là puis ceux-ci. Les élèves arrêtent leur camarade dès qu’un argument ou un exemple est trouvé. Une prise de notes au tableau rend compte des échanges qui suivent entre la professeure et les élèves. Une seconde prestation orale applique la même procédure, avec une recherche d’exemples pour nourrir un discours plus ténu.

Dans ce REP, chaque semaine, l'option Éloquence réunit treize élèves inscrits, volontaires et issus de classes de 4ème et 3ème. Ils sont encadrés par deux professeurs : l’un enseigne le commerce en SEGPA, l’autre, la Physique Chimie. Après six minutes d’échauffement du corps et de la voix, une courte discussion à deux et sa restitution sur un thème - ce jour-là « Que pouvons-nous avoir comme points communs ? » - les élèves sont invités à écouter le discours d’un étudiant lauréat d’un concours d’éloquence. Ils tentent d’en tirer des qualités nécessaires à la réussite de l’orateur. Sont ainsi relevés, exemples à l’appui, par les élèves « le ton de la voix, l’émotion, les gestes (…) », puis les intonations, la ponctuation, au service de la conviction. Le moment a proposé un modèle. Les élèves sont invités à s’exercer ensuite sur l’allocution de Greta THUNBERG à l’ONU.

On a finalement travaillé un oral comme un écrit, sans que les phrases elles-mêmes, leur longueur, leur scansion, le choix des mots ne soient revus. On recherche des exemples drôles pour faire rire le public, et non pas des formules ou des répétitions capables de rythmer le texte ou soutenir l’attention. Le travail sur un écrit maintient le risque de la lecture. L’enseignante forgera peut-être ultérieurement avec ses élèves un outil permettant d’oraliser sans rédaction intégrale au préalable.

Domaines concernés du Socle* et compétences travaillées - Domaine 1 : les langages pour penser et communiquer (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant la langue française à l'oral (…). L'élève parle, communique, argumente à l'oral de façon claire et organisée ; il adapte son niveau de langue et son discours à la situation, il écoute et prend en compte ses interlocuteurs. Il adapte sa lecture et la module en fonction de la nature et de la difficulté du texte. (…) Il utilise à bon escient les principales règles grammaticales et orthographiques. Il emploie à l'écrit comme à l'oral un vocabulaire juste et précis. Dans des situations variées, il recourt, de manière spontanée et avec efficacité, à la lecture comme à l'écriture. (…) - Domaine 2 : les méthodes et outils pour apprendre (L’élève) doit savoir (…) prendre la parole, travailler à un projet, s'entraîner en choisissant les démarches adaptées aux objectifs d'apprentissage préalablement explicités (…) et produire soi-même des contenus. La maîtrise des méthodes et outils pour apprendre développe l'autonomie et les capacités d'initiative ; elle favorise l'implication dans le travail commun, l'entraide et la coopération. (…) . Organisation du travail personnel L'élève se projette dans le temps, anticipe, planifie ses tâches. Il gère les étapes d'une production, écrite ou non, mémorise ce qui doit l'être. Il comprend le sens des consignes (…). . Coopération et réalisation de projets L'élève (…) s'engage dans un dialogue constructif, accepte la contradiction tout en défendant son point de vue, fait preuve de diplomatie, négocie et recherche un consensus. L'élève sait que la classe, l'école, l'établissement sont des lieux de collaboration, d'entraide et de mutualisation des savoirs. Il aide celui qui ne sait pas comme il apprend des autres. (…) - Domaine 3 : la formation de la personne et du citoyen (…) . Expression de la sensibilité et des opinions, respect des autres L'élève exprime ses sentiments et ses émotions en utilisant un vocabulaire précis. (…) . La règle et le droit (…) Il fonde et défend ses jugements en s'appuyant sur sa réflexion et sur sa maîtrise de l'argumentation. Il comprend les choix moraux que chacun fait dans sa vie ; il peut discuter de ces choix ainsi que de quelques grands problèmes éthiques. * Socle commun de connaissances, de compétences et de culture : extraits du texte concernant l’oral en annexe 5

Travailler l’oral par la création personnelle, se familiariser avec les ressources de l’éloquence, connaître la signification des gestes, des distances, des postures

Comment exploiter pour l'oral le goût de certains élèves pour la création poétique ?

Un exemple en atelier Slam

  • Le contexte
  • Adopter les bonnes postures
  • L'analyse de l'échange

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N.B. Code couleur : passage remarquable commenté dans l'analyse de la séance. Professeur (P) Alors, ça tombe bien, on va s(e) laisser deux minutes, même pas, vous allez choisir un texte, c(el)ui qu(e) vous voulez euh que vous allez euhlà nous redire à l’oral, on va retravailler un p(e)tit peu- un p(e)tit peu la diction. T(u) en as un sur toi Alysia, ben voilà, x toi ce s(e)ra c(el)ui-là x du coup et euh euh Irina Si tu veux, j(e) te donne un de mes miens P Un d(e) mes miens Irina Oui moi aussi j(e) me suis rendue compte de la faute en disant la phrase P Euh allez, deux minutes, très vite, même pas pour choisir un texte et l(e) redire Chaïma Mais je sais pas, j’en ai beaucoup trop, Monsieur Irina Mais vas-y c’est comme si tu disais ah j(e) sais pas quoi faire de mon argent, j’en ai trop Chaïma Pff, oh, c’est pas pareil, l’argent euh P Tire au hasard Irina C’est un compliment Chaïma Mais j’allais dire l’argent et les copies c’est pas pareil P T(u) as choisis, c’est bon ? Chaïma <…> Irina Oui P Alors, on va essayer d(e) se dire un p(e)tit peu euh quelques principes que j(e) vais pas dire obligatoires mais euh qui peuvent nous permettre de faire un bon oral et donc soit en déclamant un texte de poésie, soit en étant Chaïma [qui fait allusion à l’atelier théâtre] On a appris ça en atelier P [regardant vers Alysia] Ben super, donc toi, tu vas avoir de bonnes réponses. Du point de vue de la gestuelle, avant même de parler de sa voix, est-ce qu’i(l) y a des choses, là le cas- le-, vas-y, vas-y, pa(r)ce que là t(u) as un cas d’étude là juste avant qui était magnifique [Rires] # Irina Ah c’est un cas P [regardant Irina puis Junogou] T(u) as, t(u) as vu, ma phrase, c’était pas t(u) es un cas Junogou Mais moi je rigole, j’ai pas dit- P Vas-y Alyssa Ben, faut s(e) tenir droit, regarder son public P S(e) tenir droit, regarder son public Deux élèves, voix déçue Oh P C’est obligé de regarder son public ? Deux élèves ensemble puis Alysia - Non - Ben un peu - Non, tu peux r(e)garder un peu ta feuille, mais bon P [à voix basse et songeur] Ouais Chaïma [tendant le bras pour montrer du doig]t On essaie d’avoir le contact euh visuel ou sinon on fixe euh le- un point au fond de la salle P C(e) qui est important, c’est qu(e) le public croit que vous l(e) regardiezx ça c’est important x mais vous, vous n’avez aucune obligation de le regarder. Si ça vous gêne de capter des regards etc… i(l) y a aucune obligation, vous r(e)gardez entre deux personnes, chaque personne va croire que vous r(e)gardez l’autre hein [Rires] P [vers Alysia] Donc c(e) qui est.important, c’est qu(e) le public croit que vous le regardiez. Ok. Quoi d’autre ? Toi, tu nous as parlé de se tenir droit, comment on s(e) tient droit ? Alysia [faisant un geste des mains vers le bas des deux côtés du torse] Ben euh mm, les jambes euhm, comment dire Irina Les épaules Alysia En arrière [Rires] Alysia Euhm, les jambes, ouais, eh bah droites, quoi Élèves *** P Droit, ça veut tout dire et rien dire Chaïma Bah droit comme au tableau P L’important c’est quand.on est sur une scène [Chaïma a pris place spontanément devant le tableau et montre la posture qu’elle considère comme correcte] P Voilà i(l) y a pas de tableau, i(l) y a l(e) mur # [Courts échanges peu articulés entre Chaïma et Irina qui l’a rejointe au tableau et pose en prenant des attitudes plus ou moins rigides. On entend « se mettre comme ça, on peut s(e) mettre comme ça un peu »] Alysia Et pas parler trop vite P Bon, attends, on est sur la- on est sur la gestuelle, on va parler de, parler de la diction après. Euh,alors [L’enseignant prend place au tableau bien campé sur ses jambes légèrement écartées et regarde les élèves] P I(l) y a un truc qui va être très simple, enfin- enfin euh non, c’est pas simple du tout mais qu’on peut facilement analyser, c’est une positioneuh d’ancrage, où les pieds, qui sont un peu écartés ils sont pas forcément durs comme des bâtons, i(l)s sont un p(e)tit peu euh, voilà, un p(e)tit peu souples et not(r)e diction, notre- notre déclaration, pardon, elle va se faire un p(e)tit peu avec cette posture-là et c(e) qu’i(l) faut surtout éviter- vous savez comment on appelle des gestes qu’on contrôle pas ? Chaïma Oui, je sais, des gestes.incontrôlables P Des gestes parasites, ça s’appelle Chaïma Oui P Ça va être par exemple euh Chaïma [se frottant vigoureusement la joue droite] Se frotter Irina Mains derrière le dos P Toujours- toujours bouger ses jambes, c(el)lui qui va s(e) balancer, euh on croise un peu les jambes et qu’on parle comme ça, c’est tous les gestes qui vont montrer qu’on est pas à l’aise et du coup qui vont nous mettre un-, c’est comme un bouclier qu’on met, face à un public, et du coup le public-, ça va être essayer de gommer ça. Du coup, on va essayer juste là, on va passer dans cette position-là, ventrale, voilà, on met les pieds à peu près sous les épaules les pieds un p(e)tit peu souples, voilà, et p(u)is on dit not(r)e texte, voilà. On essaie d’être immobile au niveau des jambes. Vous allez voir qu(e) c’est pas facile. Alysia Mais Monsieur ? P Ça paraît facile, mais j(e) pense que ça va euh- ça va en démanger plus d’un au niveau des jambes Irina Mais Monsieur Chaïma [qui se lève pour s’approcher du professeur en levant la main, comme Irina, restée assise] - Mais Monsieur - Mais Monsieur, moi j(e) Irina [passant ses cheveux derrière une oreille] Mais Monsieur, moi j(e) mets ma main comme ça pour me der-, pour faire ça, , c’est une technique que j’utilise P Tu mets ta main comment ? Irina Nan je-, j’arrange mes cheveux pour faire des- P Mais, avant ou pendant ? Irina Pendant, tout le temps je fais ça tout l(e) temps P [mimant le geste d’Irina] C’est pas une très bonne idée. Enfin, c’est pas une bonne idée, tu fais c(e) que tu veux, mais ça, ça peut être considéré comme un geste parasite, par exemple. Ça sort de-, ça sort de ton texte Irina Mais justement P On va essayer ça déjà, l’histoire de l’ancrage. Vas-y Chaïma ! Chaïma Oui, j(e) fais comme ça moi, j(e) me frotte la main P Ouais. Ça c’est un geste parasite, du coup x C’est plein de choses qu’on va essayer de gommer. Tu vas essayer, tu passes en premier Chaïma ? Allez vas-y ! x Objectif, les jambes, on est concentré sur les jambes ! Et immobiles. Chaïma Bon ben j(e) vais lire un- un- un poème [Bruits de feuille. Chaïma marmonne au tableau en souriant, son calepin en main. Elle rit nerveusement]. Chaïma Je passe et repasse et rien ne se passe. Je sens- je sens un vide un vide qui ne se remplit pas. Je passe et repasse sans me douter que vous soyez plus- plus là. Je passe et repasse et j’oublie que vous regardez jamais. J’écris avec des larmes, mais c’est pas grave, je vais vers la rampe, en oubliant tout le malheur passé et je regarde du bon côté. P [suivi d’applaudissements] Super. On a bougé un p(e)tit peu au niveau des jambes ? Ah on sentait à la fin, ça- Irina Moi, j’ai vu les jambes elles ont bougé P Ça basculait un p(e)tit peu Chaïma [se penchant en avant, jambes fléchies] Mais euh, ah bon ? C’est pas comme si c’était le principe d’un corps, de bouger [Rires] P Non, non, mais elle a raison, ça a un p(e)tit peu balancé à la fin- c’était bien, non globalement, c’était bien. Mais j’ai eu l’impression à la fin, ça démangeait un p(e)tit peu. Non, non mais eh ! C’est hyper difficile comme exercice hein. Moi, au début, quand j(e) disais mes textes, j’avais un tic, j’étais comme ça, tout l(e) temps, tout l(e) temps, j(e) disais mes textes, j(e) m(e) balançais de droite à gauche Chaïma Vous y croyez ***? P Et i(l) y a plusieurs personnes qui m’ont eh, franchement euh, i(l) y a un moment on comprend plus c(e) que tu dis pa(r)ce qu’on est comme ça avec toi et du coup euh, j(e) me suis forcé à ça et c’est difficile hein, i(l) y a un moment, ça démange, on a envie d(e) bouger, c’est un exercice super difficile Chaïma En plus, moi j(e) suis boxeuse et c’est mon souci tout l(e) temps P [sautillant d’une jambe sur l’autre comme un boxeur] Nous, on fait pas un texte comme ça, sinon là, clairement [Rires] Irina Ah ce s(e)rait bien, ça donnerait d(e) la joie P Junogou, tu passes, t(u) essaies ? Allez ! Junogou Ouais j(e) suis la meilleure Irina Ouais Junogou c’est du lourd Alysia [DJ prononcé di djai) Ouais, c’est pour ça j(e) l’appelle DJ. Dure journée ! # [Quelques interjections incompréhensibles] Junogou Du désespoir dans le noir, le ciel rempli, c’est le paradis P [claquant des doigts au début] Alors j(e) t’arrête, j(e) t’arrête, on n’était pas sur la position qu’on avait demandée. On a dit les pieds- Junogou rectifie sa posture P Non, écarte un peu au niveau des épaules Chaïma ? /Ah ; Et/ la ligne, et les jambes plus écartées, et la ligne [Rires] P Eh, les filles ! Là, vous la mettez pas à l’aise, par contre ! Là on essaie, là le but c’est qu’elle soit à l’aise face au public, là en lui parlant comme ça vous la mettez pas à l’aise, donc. Essaie, écarter un peu les jambes, au niveau des épaules, voilà, super, les jambes assez souples hein, si tu veux fléchir, tu dois pouvoir, voilà, et essaie de garder cette position-là. Vas-y ! Junogou Du désespoir dans le noir, le ciel rempli, c’est le paradis. Toi et moi, c’est comme chien et chat une amitié ne sera posée un ciel rempli de nuages, avec des coins de roche. On se suit sans cesse sans se tenir avec une laisse. Ce- le partage, c’est le Père Noël, ça n’existe pas. Un livre, écrit par une femme, c’est comme si j(e) te disais iam. P [pendant les applaudissements] Super ! Moi, j’aime bien c(e)tte idée hein, moi, j’aime bien hein. Ç- ça vous apporte une présence, l’immobilité sur scène, ça apporte une présence énorme. Et là par exemple, Junogou, j(e) t’ai trouvée beaucoup plus euh charismatique par exemple que tout à l’heure pa(r)ce que immobile, immobilité j(e) suis là Chaïma ? Ouais parce que t(ou)te à l’heure- P Ouais c’(é)tait pas mal et du coup ça change énormément de choses Chaïma ? Main dans la poche P Euh, Irina, t(u) essaies ? Nan, Alysia qui dit que- qu’elle est toujours dernière. Alysia, t’écris encore une ligne ? Donc vas-y Irina. Allez Irina, allez, allez ! Irina Mais moi, j’en ai tellement,j(e) peux pas, j’en ai tellement ! P Bah, hè hè, raison de plus pour euh- Chaïma Pauvre Irina ! Quelle dure journée ! P [à Irina qui gigote un peu] Non, plus tu vas bouger, moins on va être sur ton texte. Nous on veut écouter ton texte Chaïma Quelle dure journée ! Irina à Junogou DJ P Allez ! Chaïma Pourquoi t(u) *** P Chut ! Elle est prête ! Irina [après un rire nerveux] Comment faire, j’apprécie passer du temps avec des gens ou autre [Rire] Mais la solitude [Rire] mais la solitude est parfois pour m’accompagner sur ce banc, que les gens regardent mal comme si personne (n’) y est. Je suis là, j’existe, c’est pas comme si vous ne me voy(i)ez pas et là, je crie, mon nom sur tous les toits [Chute du stylo de Chaïma] P Chaïma, t(u) es pénible. Non t(u) es pénible, Chaïma Chaïma Mais j’ai pas fait exprès ! P [pendant que Irina rit nerveusement] Il doit.être sur le bureau si t(u) arrives pas à l(e) tenir en main. Il faut qu(e) tu comportes comme tu aimerais que le public se comporte avec toi x. C’est la même chose. Allez ! Irina [à Chaïma] Que l’ortie se casse et mes cris s’entendent. Comme une formule magique qui m’aide à garder la raison x Arrête de rigoler ! Elle, Solitude, elle se tait. Eux, eux, eux qui nous regardent de manière si bizarre puis il s’ensuit des échanges de paroles, de mots. De notre côté, on voit des jambes debout qui nous regardent. De leur côté, x euh x ils voient- des filles assises durant un quart d’heure. Ah ! Nan j(e) viens de comprendre comment j(e) devais l(e) lire x De notre côté, on voit des gens qui nous regardent, de leur côté, ils voient des filles qui durant- ils voient des filles assises durant un quart d’heure. Nous- Voyons qui de nous deux cèdera le premier à la folie ? P [pendant les applaudissements] Merci Irina ! Il faudra retravailler la maîtrise de ce texte mais c’est pas mal. Allez Alysia ! C’était pas mal au niveau du m** Ah mais c’est difficile hein. Au début, c’est normal que ça perturbe Irina [brandissant son cahier] Moi ça m’étonnait quand il a des lignes, il est long, j’aime pas lire [Petits bruits] P Allez Alysia ! Chut ! Allez, elle est prête, en plus on n’a plus beaucoup l(e) temps, on a encore un truc à faire après Alysia Aujourd’hui, j(e) sais même plus c(e) que j(e) fais. Plus d’inspi, pourtant j’écris du coup, ah non non non merde. J(e) peux r(e)commencer ? P Vas-y, vas-y Alysia Aujourd’hui, j(e) sais même plus c(e) que j(e) fais. Plus d’inspi, pourtant j’écris. J(e) suis- j(e) suis plongée dans le néant, sombre, dépressive, du coup, j(e) suis posée dans l(e) bec en train de fumer sa pipe, posé à côté de moi un sandwich et p(eu)t-êt(r)e même pitch. Tous les jours, j(e) me dis qu(e) j’arrête mais pourtant j(e) recommence. C’est pire qu’un cycle. P [aux élèves qui ont des mimiques de joie et se sont levés Eh ! x J(e) sais pas c(e) que t(u) as pensé, moi j’ai trouvé ça cent fois mieux qu(e) tout à l’heure. On va s(e) faire un dernier p(e)tit truc en musique ? #

L’échange est révélateur de moments observés ou évoqués par les élèves et qui concernent la posture du déclamant. Il illustre également les stratégies d’un professeur attaché à faire travailler ses élèves à dix-sept heures passées. On se donne un thème d’exercice, ici la diction. Très vite, pourtant, l’enseignant choisit d’évoquer plus généralement « quelques principes (…) obligatoires (pour) un bon oral ». La diction est alors remplacée par la posture comme objet de travail. Sur le terrain, l’enseignant s’adapte aux circonstances. Irina et Chaïma viennent en effet de s’échapper en digression sur le thème de la richesse (en poésie, en argent). Elles adoptent une posture ludique et sont rappelées à une posture scolaire : on parlera donc de « la gestuelle, avant même de parler de sa voix » ; Chaïma, qui se targue de savoir déjà, pourra donner « de bonnes réponses ». Le professeur semble donc avoir trouvé une solution de compromis, entre la posture de contrôle qu’il écarte et la posture d’enseignement descendant, inappropriée, a priori, à une activité en atelier. Les élèves sont donc sollicités sur le corps, peut-être à leur corps défendant. Il sera donc question du « regard », de la « position d’ancrage », des « gestes parasites », qui implicitement peuvent signer la gêne, le manque de conviction ou la nervosité. Le professeur d’EPS insiste sur l’immobilité des « jambes(,) assez souples » néanmoins. Le travail sur la diction est donc ajourné. Peut-être le choix du travail sur la posture est-il aussi une manière de préserver la pudeur des élèves : ils confient à l’observation des textes très intimes. D’amélioration de la syntaxe il ne sera pas question non plus dans l’échange. En son début, une erreur est signalée à Irina « Un d(e) mes miens ». « Moi aussi j(e) me suis rendue compte de la faute en disant la phrase ». De correction, il n’y aura pas, sans doute par effet de bienveillance. Sans doute entend-il maintenir une confiance réciproque avant que les élèves ne livrent à l’observation des poèmes qui les dévoilent plus encore. L’enseignant n’abdique pas pour autant tout contrôle : « Eh, les filles ! Là, vous la mettez pas à l’aise, par contre ! ». L’essentiel reste que l’élève puisse se produire en relative quiétude. L’accompagnement du professeur a finalement résolu deux dilemmes [1] : Comment contrôler la prise de parole sans stériliser les échanges, tuer la spontanéité, le plaisir ? Comment traiter l’élève comme une personne et l’impliquer dans des activités qui ont du sens pour lui sans l’exposer ? [1] Cf. Philippe PERRENOUD, La communication en classe : onze dilemmes, in Cahiers pédagogiques, 1994, n° 326, pp. 13-18. Repris dans Philippe PERRENOUD, Enseigner, agir dans l’urgence, décider dans l’incertitude. Savoirs et compétences dans un métier complexe, Paris, ESF, 1996, chapitre 2.

Dans le cadre de l’accompagnement éducatif, une séance observée a proposé notamment un travail sur les postures. Elle est menée par un enseignant d’EPS qui anime un atelier de slam. Il ne réunit que quatre collégiennes de 5ème, ce jour-là. On a d’abord écouté un clip de slam puis échangé sur son contenu. La deuxième partie propose la mise en voix de textes au choix des élèves parmi leurs créations.

Domaines concernés du Socle* et compétences travaillées - Domaine 1 : les langages pour penser et communiquer (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant la langue française à l'oral (…). L'élève parle, communique (…) à l'oral de façon claire et organisée ; il adapte son niveau de langue et son discours à la situation, il écoute et prend en compte ses interlocuteurs. Il adapte sa lecture et la module en fonction de la nature et de la difficulté du texte. (…) Il utilise à bon escient les principales règles grammaticales et orthographiques. Il emploie à l'écrit comme à l'oral un vocabulaire juste et précis. Dans des situations variées, il recourt, de manière spontanée et avec efficacité, à la lecture comme à l'écriture. (…) . Comprendre, s'exprimer en utilisant les langages des arts et du corps Sensibilisé aux démarches artistiques, l'élève apprend à s'exprimer et communiquer par les arts, de manière individuelle et collective, en concevant et réalisant des productions (…) verbales notamment. (…) Il apprend ainsi le contrôle et la maîtrise de soi. - Domaine 2 : les méthodes et outils pour apprendre (L’élève) doit savoir (…) prendre la parole, travailler à un projet, s'entraîner en choisissant les démarches adaptées aux objectifs d'apprentissage préalablement explicités (…) et produire soi-même des contenus. La maîtrise des méthodes et outils pour apprendre développe l'autonomie et les capacités d'initiative ; elle favorise l'implication dans le travail commun, l'entraide et la coopération. (…) . Organisation du travail personnel L'élève (…) comprend le sens des consignes (…). . Coopération et réalisation de projets (…) L'élève sait que la classe, l'école, l'établissement sont des lieux de collaboration, d'entraide et de mutualisation des savoirs. Il aide celui qui ne sait pas comme il apprend des autres. (…) - Domaine 3 : la formation de la personne et du citoyen (…) . Expression de la sensibilité et des opinions, respect des autres L'élève exprime ses sentiments et ses émotions en utilisant un vocabulaire précis. (…) * Socle commun de connaissances, de compétences et de culture : extraits du texte concernant l’oral en annexe 5

Transmettre et dialoguer pour apprendre par et pour l’oral

Des travaux de groupes

Du dialogue enseignant/élèves en classe

Débats, discussions institutionnalisées, conseils d’élèves

Du dialogue enseignant/élèves en classe

Dialoguer avec les élèves : savoir limiter son temps de parole, offrir une place véritable aux propos des élèves par un questionnement très ouvert

Porter une attention particulière à la passation des consignes, des méthodes et à la reformulation

Faire retour des retours spécifiques, explicites et sélectifs sur le travail réalisé en utilisant des termes positifs pour donner confiance

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2

3

Dialoguer avec les élèves : savoir limiter son temps de parole, offrir une place véritable aux propos des élèves par un questionnement très ouvert.

Le cours dialogué n’a pas disparu. Nous l’avons observé dans le Premier et plus encore dans le Second degrés, parfois tout au long d’une séance, plus souvent sur une ou plusieurs de ses phases souvent assez longues. Les élèves qui y sont accoutumés introduisent leurs interventions dans le flux de la parole du professeur ou dans l’intervalle de ses interrogations. Parmi eux, beaucoup considèrent que l’oral sert d’abord à donner de bonnes réponses.

1. De la difficulté de l'enseignant à laisser parler en continu : un exemple en SVT en inter-degrés

  • Le contexte
  • Un long dialogue entre le professeur et les élèves
  • L'analyse de la séance

2. Des risques du cours dialogué : un exemple en classe de 4ème en Français

  • Le contexte
  • Premiers échanges à propos du texte à l'étude
  • L'analyse de la séance

1

S3C

N.B. Codage couleur : passage remarquable commenté dans l'analyse de la séance. Professeur (P) Normalement, ça cuit et à la fin on a peut-être du pain. Et pour savoir si on a peut-être du pain, il faut savoir reconnaître du pain. Ça r(e)ssemble à quoi du pain ? Élève (E) 1 Du pain euh euh c’est un mélange de blé et d(e) farine P Visuellement, ça ressemble à quoi du pain ? E2 Ça r(e)ssemble à une baguette P Oui, une baguette tu la r(e)connaîs à quoi ? Les caractéristiques d’une baguette ? E1 C’est doré. I(l) y a d(e) la farine. P Qu’est-ce qui est doré ? E3 La croûte. P Ok donc une croûte, i(l) y a une partie craquante, d’accord, et dorée. Et à l’intérieur, qu’est-ce qu’on a ? E4 Euh la mie P I(l) y a d(e) la mie. Et comment on r(e)connaît d(e) la mie ? Une bonne mie ? I(l) y a quoi dans une bonne mie ? E5 C’est mou P C’est mou, oui E6 <…> P Parle plus fort E6 J’allais dire ça P C’est ? E6 J’allais dire ça P Que c’était mou ? Oui E7 I(l) y des trous P On appelle ça comment les trous ? E1 Des- parce qu’i(l)s coupent après i(l)s mettent au four et ça fait des gros trous P C’est quoi ça, c’est des ? E8 Coupures P C’est des x bulles, des bulles, dans la mie i(l) y a des bulles x des bulles d’air. D’accord ? On va voir, par rapport à c(e) qu’on a obtenu si on a bien du pain, ou pas. Alors, du coup, ici, on a, au milieu parce que là j’ai récupéré les pains des groupes d’avant, *** les vôtres i(l)s seront prêts peut-être à la fin de l’heure, on va voir. Alors, est-ce qu’on va les goûter ? E - Oui - Oui - Non - Non P Non, eh non. Pourquoi ? E [qui ?] Non, on s’est pas lavé les mains P Non, on s’est pas lavé les mains. Deuxièmement, est-ce que ce lieu ici, c’est une cuisine ? Nombreux élèves - Non - Non - Non - Non - Non P Non, c’est un labo. Et ça c’est quoi ? E [qui ?] C’est un bac à dissection. Ok. En temps normal, on s’en sert pour ? Plusieurs élèves - Disséquer - Disséquer P Disséquer. À chaque fois j(e) les lave hein au liquide vaisselle, mais bon, disons que ça a vu passer plein de corps de poissons, plein de cœurs d’agneaux, poumons E [qui ?] Oh P On n’a pas envie d’avoir un arrière-goût dans not(r)e pain. Donc du coup, on va pas l(e) manger. Mais on va pouvoir l’observer. Donc ici celui du suspect 5. C’est quoi les ingrédients qu’a utilisé le suspect 5 ? E9 De l’eau, du lait et d(e) la farine. P T’es sûre ? E9 Oui P [chaussant ses lunettes] Alors, hop ! Est-ce que ça r(e)ssemble à du pain à l’intérieur ? Assez nombreux élèves - Non - Non - Non - Non P Ah, pas du tout xx Qu’est-ce qui manque à l’intérieur ? E10 C’est cru E11 De l’eau P Non regarde ! Qu’est-ce qui manque à l’intérieur ? E12 I()l y a des *** P Ah, j(e) sais pas, mais normalement qu’est-ce qu’on a à l’intérieur ? Deux élèves - De la farine - De la mie P On la r(e)connaît à quoi la mie ?xx Une bonne baguette ? E1 C’est blanc, c’est blanc P Avec des bulles. Est-ce que là i(l) y a des bulles ? Deux élèves - Non - Non P [qui fait le tour des paillasses en montrant le pâton] Là, i(l) y a pas d(e) bulles, on est d’accord ?Euh, on a l’impression qu(e) le suspect 5 sait pas trop bien faire du pain. Voyez, i(l) y a pas une seule bulle. Xx Pas une seule bulle. Xx Alors, ça, c’est l(e) suspect 5. Alors, le numéro 2. Qui-est-ce qui avait le numéro 2 ? [On découvre le produit que le professeur montre. C’est du pain ? Oui, parce qu’il y a des bulles. On passera en revue de la même manière les pâtons des différents groupes pour savoir, à l’observation, s’il s’agit de pain]

Dans l’enquête, les élèves n’ont pas d’initiative, ne recherchent pas de définition ni ne confrontent eux-mêmes les résultats de leurs expériences. L’enseignant conduit là où il veut mener. Les questions fermées se succèdent. Deux mots ou une très courte phrase suffisent à la réponse. Dans ce cours représentatif de beaucoup d’autres, le temps de parole de l’adulte excède celui des élèves, dans une proportion de 54 contre 46 % du total. Ailleurs, le déséquilibre a pu être bien plus marqué, dans un rapport de 80-20%. Dans cette séance pendant laquelle les élèves ont manipulé, travaillé ensemble, écouté pour découvrir des notions, on peut continuer la statistique, encore représentative dans ses détails. Le dire des élèves ne domine que pour la parole informelle (52 % des quinze minutes de ce type) : les phrases sont alors à leur initiative. Elles commentent la manipulation : « Mets pas toute l’eau ! », « Ça va pas être assez liquide », « Fais gaffe, t’en mets partout » etc... La formulation n’est ni reprise, ni améliorée par l’enseignant. Il a en revanche le monopole de la parole structurée, scolaire, délivrée au moment de l’institutionnalisation du savoir. Il détient 79 % de la parole en continu. Elle correspond notamment à la présentation du travail et des consignes. Finalement, le déroulement de cette séance ne laisse aucun temps de tr