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Psychose Utilisé à tout-va notamment à la suite d’événements de grande ampleur comme les attentats, le terme de psychose a souvent vu son sens déformé. “Dans le langage grand public, la psychose est vue comme une peur collective contagieuse. C’est un usage complétement tordu du terme psychiatrique, selon la psychanalyste Valérie Blanco. En réalité, le diagnostic le plus proche de cette définition que l’on se fait de la psychose serait l’hystérie, où l’on peut trouver de tels phénomènes de contagion psychique.” Selon le sociologue Robert Ebguy, “psychose, comme névrose, est devenu un terme courant, pratique pour qualifier son entourage sur le ton de l’humour vache”. En psychanalyse, la psychose n’est pas une maladie mais une structure, au même titre que la névrose et la perversion. Bien plus sérieuses qu’une simple peur collective, les psychoses relèvent plutôt d’un ensemble de symptômes constituant un trouble mental grave et invalidant trouble mental grave et invalidant.

Psychopathe “Fou”, “dangereux”, “mégalo” ou encore “manipulateur”... La psychopathie fascine le grand public et les interprétations, pas toujours fidèles à la réalité, ne manquent pas. “En anglais, le terme générique de “psycho” recouvre les termes français de “dingue” ou “zinzin”. Tout le monde l’est plus ou moins, c’est ce que l’on entend un peu partout”, note le sociologue Robert Ebguy. Et pour cause, de Dexter à Esprits criminels, rares sont les séries télévisées et thrillers qui n’ont pas “leur” psychopathe. Dans les cas les plus extrêmes, il sera peut-être même un tueur en série. Pourtant, dans la réalité, ce grave trouble du comportement ne concerne pas plus de 3% des hommes et 1% des femmes. Pathologie destructrice puisque impliquant souvent la manipulation et le mensonge, la psychopathie est complexe mais elle peut être traitée.

Schizophrénie Une idée reçue fait du schizophrène une personnalité potentiellement violente et dangereuse en société. Le mot fait peur et de nombreux films, séries et autres romans policiers aiment en faire leurs héros. Pourtant, moins de 1% des crimes seraient commis par des personnes atteintes de troubles mentaux. “Dans le langage grand public, le schizophrène est quelqu’un de fou, qui possède des personnalités multiples. Or, selon Valérie Blanco, ces caractéristiques ne sont pas celles que l’on rencontre le plus fréquemment chez le schizophrène”, qui souffre de dissociation, c’est-à-dire une sorte de dislocation de la personnalité. Pour le sociologue Robert Ebguy, “le terme “schizo” est devenu une insulte désignant les trois quarts du temps un décalage entre le dire et le faire”.

Trisomique En octobre 2015, le journal Charlie hebdo présente Nadine Morano comme la “fille trisomique cachée de De Gaulle”. L’image scandalise sur les réseaux sociaux et au sein des associations d’aide aux personnes handicapées. La revue satirique n’était pas la première à susciter la polémique. Elie Semoun, Dieudonné, Patrick Timsit... depuis des années, le terme “trisomique” est utilisé à tort et à travers, pour blaguer ou pour blesser. Dans les cours d’école, il n’est pas rare d’entendre les termes “mongole” ou “mongolien” sortir de la bouche d’enfants qui n’en connaissent pas la signification. Alors, comment le nom d’une anomalie chromosomique congénitale a t-il pu quitter le champ lexical de la “psy” pour se banaliser ? “La trisomie a cette particularité que la personne qui en est atteinte possède également des caractéristiques physiques particulières, explique Valérie Blanco. L’image associée à un mot facilite la circulation et l’utilisation de ce terme.”

Bipolaire C’est certainement l’un des termes issus de la psychiatrie les plus utilisés actuellement par le grand public et l’un des plus représentés dans les oeuvres de fiction. Dans le langage courant, le mot “bipolaire” est le plus souvent associé à une personne lunatique, à l’humeur variable, voire folle ou dangereuse. “On met tout et n’importe quoi dans la bipolarité, fait remarquer Valérie Blanco. Même les mouvements d’humeur ou la tristesse du deuil, qui sont pourtant des choses normales chez chacun d’entre nous.” Si elle a bien pour symptômes des troubles de l'humeur oscillant entre euphorie et mélancolie, la bipolarité, autrefois appelée psychose maniaco-dépressive, est une maladie complexe qui ne touche que 1% de la population, chez laquelle il n’existe pas de profil type.

Dépressif “La voisine a triste mine. Elle sort en jogging et n’est pas allée chez le coiffeur depuis trois semaines : c’est sûr, elle est dépressive.” Les idées reçues autour de la dépression sont nombreuses et parfois bien éloignées de la réalité. “La dépression est la plupart du temps associée à la tristesse, note Valérie Blanco. Pourtant, certaines personnes dépressives n’éprouvent jamais de tristesse”. Être triste et déprimé ne signifie pas forcément être dépressif. A l’inverse d’une déprime temporaire, la dépression est un état durable de profonde tristesse.

Pervers narcissique De nos jours, le pervers narcissique est partout, des romans aux séries télé en passant par les magazines people. Pourtant, pour Valérie Blanco, le terme en lui-même ne signifie rien d’un point de vue psychiatrique : “Ce n’est ni une structure, ni un diagnostic.” Si le pervers et le narcissique existaient déjà, le pervers narcissique apparait pour la première fois en 1986, présenté par Paul-Claude Racamier. En 1987 et 1992, le psychiatre et psychanalyste décrit cette notion nouvelle comme “une façon organisée de se défendre de toute douleur et contradiction internes et de les expulser pour les faire couver ailleurs, tout en se survalorisant, tout cela aux dépens d’autrui”. “Dans le langage courant, explique Valérie Blanco, le pervers narcissique désigne quelqu’un de mégalo et manipulateur. Si je devais en faire un diagnostic, dans la plupart des cas, ce serait plutôt celui d’une psychose.”

Nymphomane “Souvent lorsque l’on parle d’une personne nymphomane, on pense à une fille dite “facile”, à une “Marie couche-toi-là”, analyse Valérie Blanco. L’utilisation de ce terme est péjorative et on y détecte une forme de mysogynie. On considère que l’homme a le droit d’être un Don Juan, mais dans une situation similaire, la femme sera vue comme une catin.” Sujet tabou, la nymphomanie, ou fureur utérine, est souvent victime de préjugés. Cette pathologie est pourtant bien réelle et toucherait particulièrement les personnes à tendances bipolaires. Les femmes atteintes de nymphomanie sont en recherche constante de sensations de plaisir dont elles sont dépendantes. Au XIXème siècle, le docteur Krafft-Ebing, psychiatre austro-hongrois, décrivait la personne nymphomane comme “souffrant d'une exagération morbide des instincts sexuels”. Cette hypersexualité existe aussi chez les hommes, sous le nom de satyriasis.

Autiste En mars 2013, Laurent Wauquiez demandait à François Hollande de ne “pas rester autiste” face au mouvement contre le Mariage pour tous. En 2012, c’est la marionnette de David Douillet qui héritait de ce qualificatif dans Les Guignols de l’info. “Solitaires”, “timides”, “têtus”, “refermés sur eux-mêmes” ou “dans leur bulle”... Avec le temps, le terme d’autiste a envahi le langage courant pour être utilisé à toutes les sauces. “Pour beaucoup d’enfants, l’autiste peut même être violent et méchant”, déplore Sandrine Frison, assistante de vie et bénévole auprès de personnes atteintes de handicap. Des préjugés qui, selon elle, ne sont pas sans conséquences : “L’autiste a une réaction d’enfermement quand il entend ces termes, mais il ne faut pas croire qu’il ne les entend pas.” Pour Valérie Blanco, ces idées reçues viennent surtout d’une mauvaise connaissance de la maladie : “On qualifie souvent d’autiste une personne qui a des difficultés de communication. En réalité, l’autiste n’a pas accès à l’Autre parce qu’il ne le peut pas.”